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La sage voie de la naissance

Angélique L’Hérault-Blanchet est sage-femme au Bas-Saint-Laurent. Photo : Courtoisie

La mère d’Angélique L’Hérault-Blanchet a confié ses quatre accouchements et ses suivis de grossesse à une sage-femme. Il faut croire que l’expérience a été salutaire pour Angélique, puisque la jeune femme originaire de Lévis est aujourd’hui elle-même devenue sage-femme.

« Ce que j’aime dans ce métier, c’est la proximité avec les gens. Nous créons des liens profonds, une relation de confiance qui est essentielle pour accompagner une naissance », confie celle qui offre ses services depuis quatre ans au Bas-Saint-Laurent, Kamouraska inclus.

Angélique accompagne les familles de la région dans un parcours de grossesse axé sur le respect et la personnalisation des soins. « Une femme enceinte a trois options pour son suivi : un gynécologue, un médecin de famille, ou une sage-femme, explique-t-elle. En choisissant la sage-femme, elle bénéficie d’un suivi complet qui inclut l’accouchement et les soins postnataux jusqu’à six semaines après la naissance, une continuité qui offre souvent un grand réconfort aux familles. »

En dépit de la légalisation de la profession il y a 25 ans, la pratique sage-femme demeure méconnue et parfois mal comprise au Québec. « Les gens nous imaginent encore comme des voisines bienveillantes qui viennent aider lors des accouchements, comme au siècle dernier. On lutte constamment contre cette image dépassée », mentionne Angélique.

Profession sage-femme

De fait, on est loin des Filles de Caleb. Les sages-femmes québécoises sont des professionnelles de la santé. Leur formation exige un baccalauréat de quatre ans et demi, offert à l’Université du Québec à Trois-Rivières. Le programme intensif comprend de nombreuses heures de stage. « Nous sommes formées aux urgences obstétricales et à la réanimation néonatale, avec des certifications que nous renouvelons régulièrement. C’est une formation poussée qui garantit notre autonomie, et la sécurité de nos patientes », précise Angélique.

Seulement 250 sages-femmes pratiquent au Québec. Au Bas-Saint-Laurent, la petite équipe de huit sages-femmes dessert un vaste territoire du Kamouraska à Rimouski. L’intérêt grandissant pour le suivi sage-femme pousse les familles à s’informer davantage. « Il y a une demande croissante, et parfois nos équipes sont réduites en raison des disponibilités. Cela montre l’importance de former plus de sages-femmes pour répondre à cette popularité croissante », explique Angélique.

Un lien fort

Au quotidien, le travail de la sage-femme se distingue par la profondeur du lien qu’elle tisse avec ses patientes. « Nos rendez-vous durent en moyenne 45 minutes, parfois une heure. Nous prenons vraiment le temps de répondre aux questions, et de préparer les parents à l’accouchement et à l’accueil du nouveau-né », note Angélique. Le suivi postnatal, assuré par des visites à domicile, permet aux sages-femmes d’apporter un soutien précieux, particulièrement pour les jeunes mères qui choisissent d’allaiter. Cet accompagnement postaccouchement favorise le bien-être de la mère et de l’enfant, tout en offrant une transition douce vers le rôle de parent.

Pour Angélique, le cœur de la pratique sage-femme est la relation de confiance bâtie au fil des rencontres. « Nous accompagnons les familles dans des moments uniques. Savoir que nous sommes là, prêtes à répondre aux inquiétudes et à respecter les souhaits de chaque famille, apporte un sentiment de sécurité inestimable. »

Pour faire appel aux services d’une sage-femme, la future mère, dès qu’elle apprend sa grossesse, peut contacter directement la maison de naissance de Lévis ou le CLSC de sa région, sans avoir besoin d’une référence médicale. La première rencontre en est souvent une d’information, ou le couple peut poser toutes leurs questions, sans engagement. « C’est un moment où l’on explique comment fonctionne tout le processus avec une sage-femme, et où l’on discute des attentes et des besoins du couple. Ils repartent avec une meilleure compréhension de notre approche, et peuvent réfléchir avant de s’engager dans ce type d’accompagnement », conclut Angélique L’Hérault-Blanchet.

Un choix éclairant pour Clotilde Paulin

Clotilde Paulin n’a que de bons mots pour le suivi de grossesse dont elle a bénéficié avec une sage-femme. Photo : Julie Houde-Audet

Clotilde Paulin, de Saint-Germain-de-Kamouraska, a choisi le suivi de sage-femme pour sa première grossesse, et n’en retient que du positif. De l’accompagnement personnalisé à l’accouchement en maison de naissance, son expérience lui a offert une approche humaine et respectueuse de ses choix.

« Je tenais à avoir un accouchement totalement naturel. Avec une sage-femme, j’ai eu l’impression d’être vraiment accompagnée dans cette démarche », confie Clotilde, soulignant que le suivi de sage-femme permet de bâtir une relation de confiance, qui assure que la personne présente durant la grossesse soit également celle qui est là pour l’accouchement. « Dans le système conventionnel, ce n’est pas toujours possible, mais avec les sages-femmes, on est suivi par deux personnes qui s’assurent d’être disponibles pour l’accouchement. »

Selon elle, l’une des forces de cet encadrement réside dans l’approche ouverte, et dans l’autonomie laissée aux parents. Elle explique que les sages-femmes donnent toujours le choix, en présentant de façon objective les avantages et les inconvénients des options. « Cette approche de libre choix, où on nous laisse décider, m’a beaucoup plu. »

Accouchement à Lévis

Faute d’une installation plus proche, Clotilde a accouché à la maison de naissance de Lévis. « J’ai beaucoup apprécié l’atmosphère chaleureuse et familiale de ce lieu. On se sent un peu comme à la maison, loin de l’ambiance médicale et technique des hôpitaux. Ça a rendu le moment encore plus spécial pour moi, et pour mon conjoint qui a été pleinement impliqué. Les sages-femmes l’ont vraiment intégré dans l’expérience, et il ne s’est jamais senti mis de côté. »

Tout s’est déroulé à merveille pour la jeune mère. La continuité des soins a été rassurante. « Même si cela prend plusieurs heures, ce sont les mêmes personnes qui sont avec nous. »

Désormais maman d’une petite fille en pleine santé, Clotilde se dit prête à recommander cette expérience à quiconque envisage un suivi de grossesse avec une sage-femme. Elle souhaite également que plus de gens connaissent l’accès gratuit à ce service au Québec. « Les sages-femmes sont des professionnelles formées à l’université, au même titre que les autres intervenants du réseau de la santé. Elles s’occupent des grossesses sans risque, et leur travail est tout aussi rigoureux. »

Clotilde Paulin espère que le Kamouraska aura un jour de sa propre maison de naissance. « Avoir une telle infrastructure près de chez nous donnerait l’occasion à davantage de familles de vivre cette expérience unique et enrichissante. »

25 ans de reconnaissance

Seulement le quart des Québécois savent que les services de sages-femmes sont couverts par la RAMQ. Photo : Marjon Besteman, Pixabay

Le 24 septembre 1999, la profession de sage-femme a été officiellement reconnue au Québec, ce qui représente une avancée significative pour le droit de choisir un suivi adapté aux besoins de chaque femme. Mais 25 ans plus tard, la visibilité de la profession et l’accès aux services de sage-femme demeurent des défis de taille.

« Le gouvernement s’est engagé en 2015 à ce que 10 % des suivis de maternité soient réalisés par des sages-femmes en 2019. Toutefois, seulement 4,5 % des femmes enceintes au Québec bénéficient de ces services aujourd’hui, ce qui est bien en deçà de l’objectif », note la présidente du Regroupement Les sages-femmes du Québec, Amaili Jetté.

Les sages-femmes, professionnelles de la santé spécialisées en périnatalité, offrent une approche axée sur le suivi complet de la grossesse, l’accouchement et les soins postnataux. Malgré leur intégration dans le réseau de santé, elles demeurent méconnues du grand public.

Un sondage Léger réalisé pour l’Association pour la santé publique du Québec révèle que seulement 25 % des Québécois savent que les services de sages-femmes sont couverts par la RAMQ, et seulement 16 % savent comment y accéder. « Cette méconnaissance prive de nombreuses familles de la possibilité de bénéficier d’un accompagnement personnalisé et souvent plus humain », note la Coalition pour la pratique sage-femme. « Certaines régions du Québec, notamment les plus éloignées, n’ont pas encore accès aux services de sages-femmes, ce qui prive plusieurs familles de cette approche centrée sur la femme et la famille », poursuit Sarah Landry, porte-parole de la Coalition.

Au Bas-Saint-Laurent, huit sages-femmes desservent une vaste étendue, du Kamouraska à Rimouski. Les familles peuvent bénéficier d’un suivi complet. Le Centre intégré de santé et de services sociaux indique que le nombre de sages-femmes comble la demande. À l’occasion de ce 25e anniversaire de la reconnaissance de leur profession, la Coalition pour la pratique sage-femme réitère l’importance de développer l’accès à ce service essentiel.