Le Kamouraska n’aurait pas à craindre des quantités d’eau présentes dans son sous-sol selon les résultats préliminaires du Projet d’acquisition de connaissances sur les eaux souterraines dans Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata également appelé PACES KRT. Leur disponibilité et la recharge des aquifères (roche réservoir) qui les emmagasinent seraient toutefois plus favorables dans les hauts plateaux appalachiens.
Gwendoline Tommi Morin, professionnelle de recherche au Département de Biologie, Chimie et Géographie de l’Université du Québec à Rimouski, a travaillé au PACES KRT. Elle est celle qui a communiqué une synthèse des données récoltées dans le cadre du projet d’acquisition de connaissances, lors d’une conférence virtuelle organisée par l’Organisme de bassins versants de Kamouraska, L’Islet et Rivière-du-Loup OBAKIR.
Ainsi, si le seuil d’exploitation durable des eaux souterraines ne peut excéder 20 %, la consommation actuelle dans chacun des bassins versants du territoire étudié se trouve bien en deçà de cette limite. La recharge de ces aquifères serait même suffisante pour répondre à cette consommation.
Un exemple a même été partagé afin d’illustrer la situation, à partir du bassin versant de la rivière Fouquette. Considéré comme étant celui à l’étude ayant la capacité de recharge la plus faible de ses aquifères, une présentation de calculs simplifiés a permis de déterminer que ce dernier pourrait soutenir l’activité humaine de 21 481 personnes et de 55 555 vaches, ce qui est bien supérieur à la population actuelle réelle et combinée des municipalités de Saint-André, Saint-Alexandre et Sainte-Hélène qui y sont rattachés.
« Il faut quand même s’enlever de la tête qu’il y a de l’eau en masse au Québec et que sa disponibilité n’est pas un problème », a tenu à rappeler Gwendoline Tommi Morin, en introduction.
Si les eaux de surface ne sont pas réparties de façon égale sur le territoire, il en est de même pour les eaux souterraines. À ce chapitre, la professionnelle de recherche a bien démontré qu’au Kamouraska, les aquifères avec les eaux souterraines les plus accessibles, de meilleure qualité et à la meilleure capacité de recharge, se trouvaient dans le Haut-Pays de Kamouraska.
Le type de sol explique essentiellement cette réalité. Dans la plaine du littoral, où les terrains argileux sont très épais et dominants, le mauvais drainage de ces sols nuit à l’emmagasinement de l’eau souterraine au profit d’un ruissellement plus accentué. Gwendoline Tommi Morin est d’avis qu’il s’agit d’une donnée à prendre en considération pour les municipalités de la plaine côtière qui s’approvisionne en eau souterraine et où l’essentiel de la population et de l’activité économique se concentre.
« Une recharge qui est meilleure dans les hauts plateaux démontre l’importance d’une gestion plus intégrée de l’eau. Les municipalités doivent tenir compte de ce qui se passe autour d’elles et ne pas seulement se concentrer sur ses propres puits. L’eau n’a pas de frontière », ajoute-t-elle.
Changements climatiques
Cette gestion intégrée est encore plus souhaitable dans le contexte des changements climatiques qui laissent entrevoir une hausse des températures de l’ordre de 3 °C en moyenne dans la région, dans les prochaines décennies. Selon Sylvestre Delmotte, consultant en agroenvironnement, modélisation et démarches participatives, l’augmentation des températures ne devrait pas avoir d’impact négatif sur les aquifères. Au contraire, la hausse des précipitations envisagées à l’automne et à l’hiver et les prévisions démographiques qui annoncent une diminution de la population devraient permettre de maintenir les eaux souterraines à un seuil d’exploitation durable.
Néanmoins, la problématique à prévoir serait davantage au chapitre des cours d’eau, des étangs et des puits de surface qui dans leur cas servent souvent à l’irrigation dans le domaine agricole. L’augmentation des températures en été entraînerait inévitablement davantage d’évapotranspiration du sol et des débits d’étiage dans les cours d’eau (période de baisse du niveau de l’eau) beaucoup plus prononcés.
Dans ce contexte où il est à prévoir une hausse des besoins en irrigation de 30 à 40 %, des stratégies d’adaptation seront nécessaires du côté des entreprises agricoles afin d’adopter des pratiques plus durables à ce chapitre et éviter une pression indue sur les aquifères. La démarche Agriclimat qui consiste en un plan d’adaptation de l’agriculture du Bas-Saint-Laurent aux changements climatiques est un outil proposant différentes actions, auquel Sylvestre Delmotte invite les agriculteurs de la région à se référer.