Comment entrevois-tu l’avenir? Lorsque Louis Turbide m’a posé cette question lors de mon entrevue d’embauche au Placoteux, j’ai compris qu’il me parlait de l’avenir du journal. J’ai répondu téteusement que Le Placoteux devait continuer de refléter la vie des gens d’ici. La réplique habituelle lorsqu’on est pris de court. « Non, je parle de ta retraite! »
Je suis resté assez frette. On ne m’avait jamais posé cette question, alors j’ai répondu en boutade : « Regardez mon linge, c’est évident que je ne suis pas monsieur REER ». Cela dit, je ne suis plus une jeunesse, mais à quel âge devient-on vieux?
Je n’ai jamais pensé à la retraite. Je ne l’ai même jamais envisagée. Pourquoi je travaillerais toute ma vie, pour regarder la TV avec un chat qui passe le plus clair de son temps à dormir? J’ai toujours fait ce que j’aimais. Mes talents sont devenus mon pain quotidien : la musique, l’écriture. Je m’amuse. Et je n’ai jamais manqué de travail. Mon dada, ce sont les voyages, et j’espère pouvoir en faire encore longtemps. Je sais toutefois que j’ai beau avoir le visage d’un jeune éphèbe, reste que j’en ai plus derrière que devant.
Je connais des vieux de 20 ans, et des jeunes de 80. Janette Bertrand en a 99. Je l’entendais récemment dire qu’elle a tellement de projets qu’elle n’a pas le temps de mourir. Quelle belle philosophie! Je la crois. L’être humain est complexe, et elle s’est donnée comme but d’essayer de le comprendre. Sa vie a été bâtie sur ces mots : « pourquoi » et « comment ». Janette veut encore savoir, et regarde en avant. Elle s’ennuyait durant la pandémie? Elle s’est mise à recueillir des témoignages de vie qui sont devenus Janette et ses perles de sagesse. Un balado à 99 ans.
Tournez votre tête. Allez, je vais vous attendre. […] Alors? Hé oui. Mal au cou. En avant? Pas de problème. Regardez constamment dans le rétroviseur en voiture. Vous vous retrouverez dans le décor assez vite. Nous sommes faits pour regarder en avant.
Toujours est-il que…
À quel âge devient-on vieux? Si vous le voulez, la réponse sera : jamais. Si vous décidez de vivre vos rêves. Parce qu’un rêve avec une date, ça devient un projet. Il n’y a pas d’activités chez vous? Organisez-en. Vous avez toujours voulu faire de la musique ou du théâtre? Faites-en! Et, tiens, jouez un rôle d’ado. Vous allez avoir un fun noir, et apprendre un tout nouveau vocabulaire. T’sé, comme, genre.
Un sujet vous intéresse? L’Université du troisième âge ira dans votre coin pour présenter un atelier sur ce sujet. La recette, je crois, c’est de continuer d’apprendre, d’explorer et de s’émerveiller. Que chaque matin soit une nouvelle aventure. « Que puis-je entreprendre aujourd’hui? » Tout. N’importe quoi, même partager une bonne poutine avec vos amis, même si vous mettrez trois jours à la digérer.
Les jeunes l’ont compris. Ils ont besoin de 500 dollars? Ils amassent 500 dollars et réalisent leur projet. Ce n’est pas l’idéal pour notre modèle économique, j’en conviens, mais ils ont choisi de vivre le moment présent. J’ai vu tellement de gens mourir quelques mois après avoir pris leur retraite. Alors, « la vie, qu’ossa donne »?
Donc, je fais comme si j’étais encore ben jeune. J’ai été engagé au Placoteux il y a un mois, et au moment où vous lisez ces lignes, j’ai les pieds dans le sable en Guadeloupe. Bon, avec ma machine d’apnée du sommeil, ma poche de pilules, et le dos qui me barre, mais je suis rendu là.
Et vous? Que ferez-vous demain?