Dans son rapport déposé récemment à la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation Andrée Laforest, la Commission municipale du Québec (CMQ) recommande sans surprise la création d’une nouvelle ville issue du regroupement des municipalités de La Pocatière, Sainte-Anne-de-la-Pocatière et Saint-Onésime-d’Ixworth.
Ce rapport, signé par la commissaire Valérie Haince, fait suite à un processus de consultation publique commandé par la ministre Laforest à la demande des trois conseils municipaux concernés, et tenu en juin dernier. Le projet prévoit la création d’une nouvelle entité municipale sous le nom de Ville de La Pocatière, qui serait régie par la Loi sur les cités et villes, et dont la première élection générale est prévue pour le 2 novembre 2025.
Selon le maire actuel de La Pocatière, Vincent Bérubé, la nouvelle ville devrait ainsi avoir plus de poids au conseil des maires de la MRC de Kamouraska. « Elle aura six votes au lieu de quatre. Déjà, avec quatre votes, La Pocatière était la municipalité/ville ayant le plus de voix. Malgré cela, nous avons toujours travaillé dans un esprit de collaboration avec la MRC de Kamouraska », dit-il au Placoteux.
Une participation citoyenne largement favorable
La consultation publique a permis à 35 personnes de s’exprimer sur le projet. Parmi celles-ci, 89 % ont déclaré appuyer la fusion, soit 31 participants, alors que quatre personnes, toutes originaires de Saint-Onésime-d’Ixworth, s’y sont opposées.
Plus précisément, les huit participants originaires de La Pocatière se sont tous montrés favorables au regroupement, tout comme les quinze citoyens de Sainte-Anne-de-la-Pocatière, également unanimes en faveur du projet. À Saint-Onésime-d’Ixworth, les avis ont été plus partagés, puisque sept personnes ont appuyé la fusion, tandis que quatre s’y sont opposées. Un participant provenant d’un autre territoire, mais ayant participé au processus à titre de consultant, s’est lui aussi prononcé en faveur du regroupement.
Selon la CMQ, ces résultats reflètent un appui significatif au projet, en particulier dans les deux premières municipalités, mais aussi une majorité favorable à Saint-Onésime, malgré une pétition antérieure adressée à la ministre et réclamant un référendum.
Les arguments en faveur d’une fusion
Les citoyens favorables au regroupement ont mis de l’avant plusieurs avantages potentiels, dont l’amélioration des services municipaux tels que les routes, les loisirs et les infrastructures, une gestion plus efficace des ressources humaines et matérielles, un meilleur accès aux subventions gouvernementales, ainsi qu’une attractivité renforcée pour les jeunes familles et les entreprises. Ils voient également dans cette fusion une occasion de revitaliser le Haut-Pays, en favorisant son développement et en freinant la dévitalisation.
Le rapport insiste également sur les difficultés croissantes que rencontrent les petites municipalités en matière de ressources humaines. Selon la CMQ, le regroupement permettrait de consolider les équipes municipales, de faciliter le recrutement, d’attirer des talents qualifiés, et d’assurer une meilleure continuité des services publics.
Pétition non retenue
Les opposants ont évoqué des craintes liées à la perte de services ou à l’absence d’avantages concrets pour leur municipalité. Une pétition de plus de 300 signatures, déposée en janvier à Saint-Onésime-d’Ixworth pour réclamer un référendum, a été jugée non pertinente dans l’analyse de la CMQ puisque, dit-on, elle n’était pas opposée au projet en soi, mais portait davantage sur le processus décisionnel. La Commission souligne par ailleurs qu’aucune opposition organisée et représentative ne s’est manifestée dans le cadre de la consultation formelle.
« Le libellé de cette pétition n’était pas une opposition formelle au projet de regroupement, mais plutôt une volonté que ce projet fasse l’objet d’un exercice démocratique. On ne peut donc pas automatiquement déduire que les signataires de la pétition étaient contre le regroupement », peut-on lire dans le rapport.
L’opposition réagit
Contacté par Le Placoteux à propos des conclusions du rapport, Denis Miville, un des opposants au projet de fusion, dénonce le fait qu’il n’y ait pas de référendum sur le sujet dans la localité de Saint-Onésime-d’Ixworth, et critique du même souffle le déroulement de la consultation publique.
« Nos élus avaient peur de faire un référendum, car ils l’auraient perdu, j’en suis convaincu. Lorsque j’ai fait mon porte-à-porte sur la possible tenue d’un tel exercice démocratique pour notre municipalité, 80 % et plus des gens sondés se disaient en défaveur du projet de regroupement. Qui plus est, nous avons été mal informés pour la consultation publique. On pensait que ça allait être une simple période de questions et de réponses, et non un exercice filmé en présence de journalistes. Cette situation en a refroidi certains qui ne se sont finalement pas présentés au micro. Par contre, les gens dans la salle ont chaudement applaudi lorsque les quatre qui ont eu le courage de se lever se sont exprimés contre, alors qu’ils sont demeurés muets lorsque ce fut le tour des autres, qui étaient pour la fusion », explique Denis Miville.
Une recommandation claire
En conclusion, la CMQ recommande à la ministre de procéder au regroupement, estimant que le statu quo ne répond pas aux enjeux actuels des trois municipalités, notamment en matière de vitalisation, de gouvernance et de développement durable.
La création de la nouvelle Ville de La Pocatière représenterait, selon la Commission, une occasion unique d’optimiser les services, de renforcer la cohésion territoriale, et de mieux répondre aux aspirations des citoyens.
« Je tiens à saluer le travail de la Commission municipale du Québec, ainsi que le soutien de tous les conseils impliqués qui ont permis d’atteindre cette étape. Ensemble, nous avons le pouvoir de bâtir un avenir encore plus prometteur pour nos communautés. Je suis convaincu que ce regroupement apportera de nombreux avantages, notamment en matière de gestion des ressources, de planification urbaine et de développement économique. La consolidation de nos territoires nous permettra de mieux répondre aux besoins de nos habitants, et de favoriser une dynamique de collaboration entre nos municipalités. Je reste engagé à poursuivre ce dialogue constructif, et à travailler de concert avec tous les acteurs concernés pour assurer la réussite de ce projet », a conclu Vincent Bérubé.
Il ne reste à la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation Andrée Laforest qu’à donner son aval au regroupement.
La future Ville de La Pocatière
La future Ville de La Pocatière regrouperait une population totale d’environ 6400 habitants, issue de la fusion de trois municipalités voisines : La Pocatière avec 4206 résidents, Sainte-Anne-de-la-Pocatière avec 1673 habitants, et Saint-Onésime-d’Ixworth, qui compte 522 citoyens.
Le conseil municipal provisoire serait composé de tous les membres des trois conseils actuels. Le maire de La Pocatière en deviendrait le président, tandis que les maires de Sainte-Anne et de Saint-Onésime agiraient comme maires suppléants à tour de rôle. La première élection désignerait un maire et six conseillers, sans division en districts, selon une répartition territoriale : un représentant pour Saint-Onésime, deux pour Sainte-Anne, et trois pour La Pocatière.
Rappelons que quatre municipalités se sont retirées du processus de regroupement en 2024, soit Rivière-Ouelle, Saint-Denis-De La Bouteillerie, Saint-Pacôme et Saint-Roch-des-Aulnaies.