Des dirigeants du monde entier sont réunis à Ottawa pour étudier comment survivre au raz-de-marée de plastique qui est en train de nous submerger.
Avant de lire ces lignes, il me paraît utile de vous rappeler qu’il y a moins de cent ans, nous vivions sans plastique. C’est donc possible de s’en passer, ou du moins d’en diminuer considérablement l’usage, car nous n’aurons pas le choix de le faire.
Les plastiques sont un sous-produit du pétrole (le naphta). Environ 3 % du pétrole va à la fabrication de plastiques, c’est-à-dire 139 milliards de litres de pétrole par année. On produit ainsi chaque année 400 millions de tonnes de plastique, qui ne sont recyclées ou recyclables que dans une proportion de 10 à 15 %. Les compagnies pétrolières tiennent évidemment à ce marché lucratif. Tout ça fait en sorte que nos plastiques contribuent de façon importante à la production de gaz à effet de serre, et donc au réchauffement du climat.
Mais la menace des plastiques est surtout au niveau de l’environnement et de la santé. Les plastiques ne se dégradent pas vraiment. Ils traînent partout, dans les sites d’enfouissement, le long des routes, des rivières, des fossés, dans les océans où ils finissent par former des continents de plastique : ils persistent dans notre environnement. Décomposés en mini particules, ils s’infiltrent dans l’eau qu’on boit, dans l’air qu’on respire, dans la pluie qui tombe, dans les champs qu’on cultive, dans la nourriture qu’on mange, dans les organismes vivants : ils sont partout et ils y sont indélogeables.
La plupart des plastiques contiennent également des composés de carbone-fluor, ceux qu’on appelle les « polluants éternels » parce qu’ils sont indestructibles. Ils servent à imperméabiliser les produits à l’eau, à l’huile et au feu. On les retrouve actuellement dans tous les êtres vivants sur la Terre, donc dans chacun de nous, où ils affectent notre immunité, notre fécondité, notre cerveau, et provoquent diverses maladies et cancers de plus en plus précoces.
Les grandes entreprises pétrochimiques savent que ces produits sont mortels pour la santé, le climat, l’environnement en général, mais ils savent aussi qu’ils sont si utiles et si commodes que nous ne voulons plus nous en passer. Pourtant, il va falloir le faire sous peine de succomber à une dégénérescence, un empoisonnement et une crise environnementale incontrôlables.
Nous pouvons vivre sans plastique — nous l’avons fait pendant des millénaires — ou du moins, avec moins de plastique, et surtout, nous pouvons mieux prévenir sa dispersion dans l’environnement. Mais pour y parvenir, il faudrait surtout produire moins de plastique. C’est ce que visent les experts réunis à Ottawa par l’ONU : limiter et contrôler la production de plastique par les compagnies pétrolières et pétrochimiques, forcer l’industrie de distribution à restreindre de plus en plus l’utilisation de contenants et d’emballages en plastique, et recycler plus efficacement celui qu’on utilise.
C’est une tâche titanesque, à laquelle nous pouvons contribuer en faisant pression sur nos commerces, et en redécouvrant les contenants traditionnels : le papier, le verre, les paniers, les fibres naturelles. C’est exigeant. Et ce n’est qu’un volet du combat qu’il faut mener sur les autres fronts : l’auto et les transports, les pesticides, les perturbateurs endocriniens, la biodiversité, l’eau, etc.
Les jeunes devront ni plus ni moins réinventer la Terre et la façon d’y vivre. Les conservateurs qui font campagne pour le retour aux pailles de plastique se trompent visiblement de combat… et de siècle! Le gros bon sens!