La Chambre de commerce Kamouraska-L’Islet (CCKL) vient de lancer une campagne inattendue, intitulée « Entre un membre dans ta Chambre! » L’approche, appuyée par un visuel loufoque mettant en vedette le président de la CCKL et sa directrice générale sur le seuil d’une chambre à coucher, reprend un principe simple dûment éprouvé : celui d’encourager ses membres à en recruter d’autres, en échange d’une participation à un tirage.
La CCKL a bien orchestré la chose. Elle a d’abord augmenté ses tarifs d’adhésion, qui étaient les mêmes depuis 1999, et dont elle a fait la présentation pour approbation par les membres lors de son assemblée générale annuelle. Personne ne s’est opposé à la nouvelle grille tarifaire. La CCKL a ensuite dévoilé son nanane avec sa campagne de recrutement et le prix qui y est rattaché, au cas où la pilule de l’augmentation aurait pu passer difficilement. Bien joué!
Le président Gabriel Hudon en a profité pour confier que la CCKL aimerait atteindre les 300 membres pour le 26 janvier 2024. L’objectif est réalisable. Dans la dernière année, la Chambre a gonflé son effectif de 35 nouvelles entreprises et organismes. Avec 264 membres à l’heure actuelle, la CCKL peut facilement répéter l’exploit dans les prochains mois pour atteindre les 300 tant souhaités.
Reste à savoir maintenant où ces membres seront recrutés. Et la réponse, elle se cache sûrement quelque part dans les municipalités du Kamouraska-Est : Kamouraska, Saint-Pascal, Saint-Bruno-de-Kamouraska, Sainte-Hélène-de-Kamouraska, Saint-Germain-de-Kamouraska, Saint-André-de-Kamouraska, Saint-Alexandre-de-Kamouraska.
Un décompte des membres de la CCKL qui disposent d’une place d’affaires dans l’une ou l’autre de ces sept municipalités permet de constater leur sous-représentation — environ 27 membres sur 264 —, à peine 10 % de tout l’effectif actuel de la Chambre, alors qu’il devrait plutôt se rapprocher du 25%. Tous ceux qui ont assisté à l’assemblée générale annuelle du 28 mars ont aussi été en mesure de le constater au sein même de l’assistance et du conseil d’administration : l’extrême est du territoire n’existe tout simplement pas au sein de la CCKL.
L’erreur dans le cas présent serait toutefois d’en attribuer l’entière responsabilité à la Chambre, tout en faisant abstraction des mentalités et des dynamiques territoriales bien implantées depuis des décennies, et qui peuvent expliquer en partie cette réalité. Le pouvoir attractif de Rivière-du-Loup dans l’est du territoire rend certainement plus difficile la création d’un sentiment d’appartenance à la Chambre de commerce Kamouraska-L’Islet; comme quoi il ne suffit pas d’ajouter Kamouraska au nom de sa municipalité pour que la magie de l’attachement à nos organisations territoriales se crée. Outre Saint-Pascal, aucune des municipalités énumérées précédemment n’est membre de la CCKL!
Dans le cas bien singulier de Saint-Pascal, les commerces et industries de la ville se concentrent depuis 45 ans au sein de l’Association des gens d’affaires de Saint-Pascal. L’organisation, rattachée à l’hebdomadaire Le Placoteux, est aujourd’hui principalement active par le biais d’un comité d’animation qui organise des soirées à l’occasion… entre les gens d’affaires de Saint-Pascal! Difficile de réseauter avec des entrepreneurs d’autres municipalités et MRC si l’objectif poursuivi est de rester entre nous. Ici, la CCKL s’impose certainement comme un meilleur véhicule, en plus d’être mieux outillée pour faire entendre la voix de ses membres à l’échelle nationale par le biais de la Fédération des chambres de commerce du Québec qui, en contrepartie, est en mesure de faire du lobbying auprès des instances politiques supérieures.
Mais les bonnes vieilles habitudes ont la vie dure. Saint-Pascal, de nature plutôt « gauloise », tient à juste titre à son association, mais qui à la lumière des changements socioéconomiques des dernières années aurait peut-être intérêt à évoluer en une organisation de développement économique sous le chapeau de la Ville de Saint-Pascal, à l’image de Développement économique La Pocatière. On jase.
Néanmoins, on peut comprendre que pour des petites entreprises qui n’ont peut-être pas le loisir de multiplier les adhésions à des organisations, il demeure plus simple et naturel d’adhérer aux Gens d’affaires de Saint-Pascal qu’à la Chambre de commerce Kamouraska-L’Islet. D’autant plus que la CCKL, qui s’est constituée à partir de l’ancienne chambre de commerce de La Pocatière — bonjour les rivalités! —, a longtemps renvoyé l’image d’un gros club social pour entrepreneurs pocatois.
L’arrivée de Nancy Dubé à la direction générale de la Chambre a toutefois changé la donne. Originaire de Saint-Damase-de-L’Islet, elle a mis beaucoup d’ardeur à « travailler » le territoire de L’Islet qu’on disait jadis oublié par la Chambre, en se rapprochant des entreprises, des municipalités, de la MRC et des différentes organisations de développement socioéconomique. Aujourd’hui, le résultat est tangible et le sentiment d’appartenance des gens de cette MRC à l’égard de la CCKL s’observe dans le membership, dans les activités de la Chambre, et bien sûr au conseil d’administration.
Autant d’efforts doivent maintenant être mis dans la portion est du Kamouraska. Nancy Dubé et Gabriel Hudon ont convenu que du démarchage était à faire et qu’ils voulaient travailler conjointement en ce sens. Il faudra toutefois les accueillir, enterrer les vieilles rivalités de clocher, et peut-être même revoir certaines vaches sacrées pour y parvenir. Comme le soulignait lors de l’assemblée Mireille Thibault, directrice générale du CAE Montmagny-L’Islet, jadis attachée politique du député Norbert Morin et directrice de la Chambre de commerce et d’industrie de Montmagny, la concurrence pour nos entreprises ne se trouve plus dans la municipalité voisine, encore moins dans la MRC voisine, mais partout dans le monde. Ensemble, nous sommes plus forts!