Un patrimoine religieux en quête d’avenir

L’abbé Simon-Pierre Pelletier est responsable de l’accompagnement des paroisses du diocèse de Sainte-Anne-de-la-Pocatière. Photo : Éliane Vincent

Le patrimoine religieux du Kamouraska et de L’Islet s’est invité dans l’actualité depuis quelques semaines. La mise en vente des églises de Saint-Pacôme et de Sainte-Louise soulève la question de la pérennité de ces bâtiments dans nos sociétés de plus en plus laïques. L’abbé Simon-Pierre Pelletier, vicaire épiscopal du diocèse de Sainte-Anne-de-la-Pocatière, fait le point sur l’état du patrimoine catholique de son territoire.

Le diocèse regroupe 55 paroisses dont la santé financière va d’assez bonne à très difficile. Comme partout au Québec, l’assiduité aux activités liturgiques est en déclin, ce qui a des répercussions sur les revenus des paroisses. Certaines en viennent même à trouver difficile de verser la quote-part annuelle pour assurer les services diocésains.

« L’essentiel des revenus du diocèse sert à payer les salaires des intervenants sur le terrain, tant ceux des prêtres que des laïques qui soutiennent la pastorale dans les communautés », indique l’abbé Pelletier, tout en soulignant le fait que la masse salariale de l’institution frôle le million $ annuellement.

Dans ces conditions, l’entretien de ces bâtiments immenses que sont les églises devient rapidement un fardeau insoutenable pour les communautés. « Les bâtisses peuvent accueillir 300, 400, parfois jusqu’à 800 personnes, rappelle l’abbé Pelletier, et il n’en vient souvent qu’une vingtaine à la messe, une fois par semaine, avec, à peine, quelques mariages, baptêmes et funérailles par année. Aucun gestionnaire dans le monde ne songerait à conserver une pareille infrastructure dans ces conditions. »

Mais voilà, les églises sont le reflet de l’histoire des communautés, et elles ont été construites à la sueur et aux frais des paroissiens, souvent même contre la volonté de l’évêque du temps. Chaque village a son histoire au sujet de la construction de l’église locale, et le sentiment d’appartenance est très fort. S’en départir ouvre des blessures profondes au sein de la population.

Réinventer la paroisse

Selon Simon-Pierre Pelletier, on peut affirmer qu’aucune des églises du diocèse n’échappe à la nécessaire réflexion sur son avenir. Certaines sont reconverties à d’autres usages, comme Saint-Germain et son centre d’escalade, son école de cirque et son atelier de céramique, ou Saint-Joseph avec son café culturel et sa salle multifonctionnelle. Pour d’autres, la transition est plus complexe, comme à Sainte-Louise ou à Saint-Pacôme.

Mais dans tous les cas, le diocèse doit pallier le manque de pratique religieuse pour boucler son budget. Comme pour les municipalités, on songe désormais à regrouper les paroisses pour mutualiser les coûts de fonctionnement et le manque de relève administrative dans les fabriques. « Dans L’Islet-Sud, les sept paroisses sont en processus pour créer une seule entité. On pense que c’est la solution d’avenir pour maintenir l’animation pastorale et les activités liturgiques », explique le vicaire épiscopal. Il estime que, d’ici 2025, la nouvelle paroisse unifiée devrait voir le jour, avec son nom propre qui sera choisi par consultation populaire.

Ces efforts sont nécessaires pour les communautés, mais ne changent pas le fait que les églises ne disparaîtront pas comme par magie du paysage, et qu’il faudra prendre soin des bâtiments et leur trouver un usage qui leur évite la démolition pure et simple. À Lac-Frontière et à Mont-Carmel, elles ont été ou sont en voie d’être achetées par leur Municipalité. Partout ailleurs, la réflexion se poursuit. Pour l’abbé Pelletier, le constat est clair : « La démarche devra être faite par les paroissiens. Si ce n’est pas par une décision des citoyens, c’est par la force des choses que les changements se feront, et le résultat sera probablement plus douloureux, parce qu’il sera imposé par la situation plutôt que d’être planifié. »