Les demandes d’aide n’ont jamais été aussi importantes chez Trajectoires Hommes du KRTB. En poste depuis 17 ans, le directeur général Luc Laforest ne se souvient pas d’une époque où des hommes de la région devaient patienter sur une liste d’attente comme c’est le cas actuellement.
Trajectoires Hommes du KRTB vient en aide aux hommes en difficulté sur le plan personnel et professionnel, ainsi qu’auprès de ceux qui ont des problèmes de violence conjugale et familiale. Depuis la semaine dernière, l’OBNL cumule une liste d’attente.
« On continue d’évaluer les hommes qui cognent à notre porte ou qui nous sont référés pour s’assurer qu’ils ne présentent aucun risque homicidaire ou suicidaire avant de les placer sur la liste d’attente. On ne peut pas se permettre de faire attendre quelqu’un qui présente un risque pour les autres et pour lui-même, alors que c’est une bombe à retardement », souligne Luc Laforest.
Il n’en demeure pas moins que l’organisme aurait grandement besoin d’une ressource supplémentaire pour diminuer cette fameuse liste, lui qui fonctionne actuellement avec cinq personnes à temps plein, dont un directeur et quatre intervenants. L’argent demeure toutefois le nerf de la guerre et outre un montant non récurrent reçu récemment, le financement n’a pratiquement pas bougé depuis un moment.
Pandémie et féminicides
Cette augmentation des demandes d’aide accompagnée d’une période d’attente ne serait pas propre à Trajectoires hommes du KRTB. Selon Luc Laforest, le même phénomène s’observerait également au sein des autres organismes masculins membres du réseau À cœur d’homme. La pandémie y est sûrement pour quelque chose, reconnaît-il, mais l’organisme est encore à compiler ses statistiques à ce sujet.
L’envers de la médaille est que les hommes semblent plus enclins à demander de l’aide, eux qui ne sont pas réputés à le faire de nature. Trajectoires Hommes du KRTB remarque d’ailleurs un changement de paradigme dans sa clientèle avec une hausse du nombre de jeunes et d’hommes plus âgés qui font appel à ses services.
La forte médiatisation des cas de féminicides au Québec dans les dernières semaines — 10 depuis le début de l’année — ne serait pas non plus étrangère à la hausse des demandes d’aide. « Un homme qui regarde les nouvelles et qui voit ça passer (un féminicide), ça allume des lumières », reconnaît le directeur.
Ces tristes événements influencent même l’approche des intervenants. Une situation survenue la semaine dernière peut en témoigner alors que l’équipe de Trajectoires Hommes a déployé préventivement ce qu’elle appelle un « filet de sécurité » autour d’un homme pour qui elle s’attendait à ce que les choses dégénèrent. « Ç’a n’a pas été le cas, heureusement, mais on a réagi rapidement », poursuit-il.
La médiatisation des féminicides coïncide également avec une campagne de publicité gouvernementale dans les médias nationaux. Dans l’une d’entre elles, on peut apercevoir un homme qui se fait confronter par le facteur qui lui livre son courrier, de la même façon qu’il le fait ensuite auprès de sa conjointe avec rage et jalousie, après avoir visiblement fouillé dans son téléphone intelligent.
« Ces publicités sont excellentes, car elles s’adressent directement aux gars, à l’agresseur. En plus, la violence montrée n’est pas physique, mais verbale et psychologique. J’espère que des gars allument en voyant ça », déclare Luc Laforest.
Visionnez les publicités sur la chaîne YouTube du Secrétariat à la condition féminine.