Il y a trente ans, en 1991, le CLSC de Saint-Pascal, qui était alors un vrai centre local de services communautaires, avait choisi quatre des plus petits villages du Kamouraska, qui vivaient de plus en plus dramatiquement le déclin de leur village et la perte progressive de tous leurs services locaux, pour tenter une expérience de développement local.
Le développement local mise d’abord sur les citoyens et les ressources locales plutôt que sur l’implantation de compagnies extérieures : c’est pourquoi on le qualifie de développement endogène.
Les villages choisis étaient Kamouraska, Saint-Germain, Saint-André et Saint-Joseph. Tous ces villages comptaient moins de 800 habitants et aucun des nombreux commerces, attraits touristiques, culturels, patrimoniaux, économiques et de plein air qui font aujourd’hui la réputation du Kamouraska n’étaient pas en place. C’était des villages agricoles en déstructuration rapide.
C’est à l’animateur communautaire Gaston Lagacé que fut confiée la tâche de mettre sur pied dans chacun de ces villages un comité de développement citoyen où se retrouvaient des citoyens d’origine, des néo-ruraux et des membres du conseil municipal. Ces comités s’attaquèrent d’abord à faire le portrait réaliste de leur communauté, ses points forts et ses points faibles, et à ranimer le sentiment d’appartenance communautaire, un élément considéré par les spécialistes du développement local comme un préalable incontournable. Chaque village trouva le moyen d’impliquer son monde dans une démarche de réflexion sur l’avenir de leur village et un embryon de plan de développement. Certains, comme à Saint-Germain, firent appel aux meilleurs spécialistes du développement local de l’heure comme Bernard Vachon, Guy Roy, Hughes Dionne, et allèrent jusqu’à organiser, en 1996, le 1er Rendez-vous des acteurs du développement local en milieu rural, qui réunit 150 agents de développement ruraux de tout le Québec et de pays francophones européens.
Les résultats ne tardèrent pas à se manifester de façon originale dans chaque village,
Le Comité de Kamouraska, sous l’inspiration de Hervé Voyer, avec la collaboration de l’ITA et des agriculteurs, donna naissance aux premiers brise-vents le long de la route vers Saint-Pascal : ces brise-vents sont en voie de transformer et de restructurer tout le paysage agricole du Kamouraska qu’on photographie de partout; par la suite, le comité appuiera les premiers commerces attractifs, la Boulangerie Niemand, le Café du Clocher, et tous les projets qui suivront. Le Comité de Saint-Germain, avec Lise Rodrigue et moi-même, où il n’y avait même plus d’école primaire, misa sur sa salle communautaire réputée et la beauté de son site (« Saint-Germain-c’est-beau! ») pour créer le Théâtre-des-Prés, le Symposium de peinture, une résidence pour personnes âgées, et introduire le kayak de mer, auquel vint s’ajouter le Sentier et la mise en valeur des Cabourons, puis des fermes maraîchères. Le Comité de Saint-André, avec Gervais Darisse en tête, s’attela à remplacer la résidence pour personnes âgées de l’ancien couvent incendié par ce qui est devenu l’impressionnant complexe Desjardins du Domaine des Pèlerins. Le Comité de Saint-Joseph, avec le couple Frédéric et Rita Toner, s’est attaqué lui aussi, entre autres, à son patrimoine bâti et aux besoins de logements modiques, d’où aujourd’hui la fière Habitation Le Petit Pré et son unique Grange à dîme.
Tous ces villages se sont redécouverts et redéfinis. La vaste Opération Héritage-Kamouraska, dirigée par Michaël Schmouth de Ville La Pocatière, ainsi que les travaux de Solidarité rurale, ont su fournir à plusieurs un cadre d’intervention axé sur la mise en valeur du Kamouraska plutôt que sur le simple commerce touristique.
Ces jours-ci, les citoyens de Saint-Germain valideront leur troisième Plan de développement, qui est un véritable chef-d’oeuvre du genre, et qui nous montre un village conscient de sa vocation et pleinement maître de son destin : il propose même une nouvelle prise en charge de la vie démocratique locale. Vous pouvez le consulter à l’adresse suivante: https://cdn.gestionweblex.ca/files/7z0CP3nIT5
L’attraction qu’exerce aujourd’hui le Kamouraska tout entier n’est pas tombée du ciel : elle est l’oeuvre de citoyens et de développeurs locaux intelligents, patients et généreux, le plus souvent bénévoles. En 30 ans, ils ont contribué à transformer une société vieillissante et déclinante en une communauté vivante, jeune, diversifiée, éduquée, et à réhabiliter un des lieux les plus beaux, les plus inspirants et les plus courus du Québec : Le Doux Pays du Kamouraska.