Vorace et de plus en plus répandue, surtout dans le sud du Québec, la chenille spongieuse est désormais rendue dans Kamouraska-L’Islet. Originaire de Saint-Pacôme, André-Philippe Drapeau Picard, préposé aux renseignements entomologiques à l’Insectarium de Montréal, est de toute évidence le premier à signaler la présence de cet insecte qui s’attaque essentiellement au feuillage des feuillus.
D’apparence noire ou brune à la naissance, la spongieuse se reconnaît à la maturité durant l’été par son dos muni de cinq paires de points bleu suivi de six paires de points rouges. Deux bosses de poils noirs de chaque côté de sa tête apparaissent également durant sa croissance. Elle passe par la suite à l’état de papillon de nuit, mais actif de jour.
À son état chenille, la spongieuse est un véritable ennemi pour les feuillus, principalement le chêne rouge ou blanc, le peuplier et le bouleau blanc. Elle peut même s’attaquer aux conifères. Elle s’attaquera à ses arbres en les défoliant, la spongieuse ayant la capacité de manger l’équivalent de 1 m2 de feuilles au courant de sa vie. À terme, si l’arbre est attaqué de façon répétitive par la chenille, il risque de s’affaiblir et ultimement de mourir.
« C’est un problème pour l’industrie forestière qui a un intérêt pour les espèces de feuillus dans le sud du Québec et en Ontario. Dans les villes, elle peut diminuer la valeur esthétique des arbres, car ceux-ci vont se retrouver sans feuilles du jour au lendemain en plein milieu de l’été », raconte André-Philippe Drapeau Picard.
Espèce introduite
Comme bien des indésirables qui s’attaquent aujourd’hui à nos écosystèmes, la spongieuse n’est pas originaire d’Amérique du Nord. Elle a été introduite en Nouvelle-Angleterre près de Boston à la fin des années 1860 par un Français qui désirait faire de la soie en sol américain à partir d’un croisement entre la chenille spongieuse et le ver à soie nord-américain. Le projet n’a pas fonctionné et quelques spongieuses se sont échappées de l’élevage. La chenille prolifère depuis dans le nord-est des États-Unis et dans l’est du Canada où elle peut être aperçue en Ontario, au Québec et dans les provinces maritimes.
En visite chez ses parents l’été dernier à Saint-Pacôme, André-Philippe Drapeau Picard a observé les premiers sujets dans Kamouraska-L’Islet. Il a depuis rapporté ses observations sur le site iNaturalist.org. De retour dans la région pour la période des Fêtes, il est retourné aux différents endroits où il a observé des chenilles spongieuses l’été dernier, entre autres à la Seigneurie des Aulnaies, bien pourvue en chênes.
« J’ai remarqué beaucoup d’œufs sur l’écorce des arbres, ce qui démontre que les individus observés l’été dernier n’étaient pas quelques sujets isolés, mais un signe que l’espèce est bien implantée et que son expansion se poursuit vers l’Est-du-Québec », poursuit-il.
Selon le préposé aux renseignements entomologiques, les œufs de la spongieuse sont facilement repérables sur l’écorce des arbres puisqu’ils prennent l’allure d’une mousse qui peut contenir entre 100 et 1000 œufs sur un diamètre équivalent à une pièce de 1 $. Le pire ennemi pour ces œufs est le froid hivernal qui lorsqu’il se maintient autour de -20 °C durant plusieurs jours peut tuer jusqu’à 95 % d’entre eux.
« Comme les hivers s’annoncent plus doux dans le futur, c’est pourquoi on s’attend à ce que la mortalité des œufs de la spongieuse diminue et que l’espèce continue de se répandre vers l’est. »
Remèdes
Si vous observez la spongieuse sur vos arbres à la maison, André-Philippe Drapeau Picard suggère de partager vos informations sur le site iNaturalist.org. Cela permet de suivre en temps réel l’évolution de l’espèce qui est parmi celles dont le public envoie le plus de questions depuis quelques années au service de renseignements de l’Insectarium de Montréal.
Pour s’en départir, le préposé suggère de repérer les masses d’œufs à ce moment-ci de l’année, de les écraser ou de les décoller en les noyant dans l’eau. Le même procédé peut être fait à la fin du printemps ou au début de l’été, mais avec une paire de gants, les poils de la spongieuse pouvant être urticants.
Autrement, pour ceux qui ne veulent pas chercher les chenilles une à une, il est recommandé d’enrouler une toile de jute autour de l’arbre infesté, de l’attacher et de rabattre la moitié de la toile par-dessus la corde. La spongieuse n’aimant pas le soleil, elle ira se cacher en plein jour dans le repli. Le soir arrivé ou la nuit tombée, il suffit de retirer la toile, de ramasser les chenilles et de les jeter dans l’eau savonneuse ou de l’eau chaude mélangée à de l’eau de javel.