Pénurie d’effectifs ambulanciers : Les horaires de faction pointés du doigt

Photo : Maxime Paradis.

Les entreprises ambulancières de Kamouraska-L’Islet ne veulent pas paraître redondantes, mais la pénurie d’effectifs ambulanciers vécue actuellement au Québec a clairement un lien avec les horaires de faction qui sont encore monnaie courante en région. L’attribution d’horaires à l’heure à certains endroits plutôt que d’autres aurait même accentué le problème selon eux.

Un prix de consolation. Cette expression a été employée à quelques reprises par Daniel Caron, propriétaire du Service ambulancier Daniel Caron de Saint-Pascal, lors d’échanges avec le CISSS du Bas-Saint-Laurent. Avec huit paramédics à son emploi, tous soumis à l’horaire de faction, il estime n’avoir rien d’alléchant à proposer aux finissants en Soins préhospitaliers d’urgence quand vient le temps d’embaucher.

« Je les comprends, à l’horaire de faction, ils doivent être de garde 24 h, habiter à 5 minutes de la caserne et ils sont payés 11,43 h contre 12 h pour un paramédic sur un horaire à l’heure qui lui peut rester où il veut. S’ils choisissent de travailler pour nous quand même, souvent c’est parce qu’ils n’ont pas trouvé mieux ailleurs », résume-t-il.

Même s’il arrive à se tirer d’affaire en matière d’embauche, Daniel Caron est d’avis qu’un déséquilibre a été créé ces dernières années en attribuant des horaires à l’heure certains endroits, mais pas d’autres. La démographie et les valeurs de la nouvelle génération quant au travail se sont ensuite chargées du reste.

Ruptures de service

Tommy Chouinard d’Ambulance Chouinard à La Pocatière partage le même point de vue. Très proactif à demander la conversion d’un de ses horaires de faction en horaire à l’heure depuis plusieurs années, il emploie actuellement 16 paramédics, mais il en aurait besoin de quatre de plus pour pallier aux deux démissions et aux deux retraites qui sont survenues dans les derniers mois.

La conséquence de ce manque d’effectifs a été une rupture de service qui a duré plus de 8 h l’automne dernier. Appelée débordement, cette situation est attribuable à une des règles de la CNESST qui oblige les paramédics qui n’ont pas eu quatre heures consécutives de repos à se retirer pour une période huit heures. L’entreprise doit ensuite trouver deux autres paramédics pour prendre leur relève durant cette période de huit heures, sinon le service doit être interrompu.

« La gestion de ça, ce n’est vraiment pas évident, car ça survient à n’importe quel moment du jour. Avec un horaire à l’heure, ce genre de situation ne survient pas, car au lieu d’une équipe qui travaille 24 h, t’as deux équipes qui se partagent 12 h chaque et qui sont déjà planifiées pour prendre la relève l’une de l’autre », résume Tommy Chouinard.

Une situation similaire est aussi survenue à Saint-Jean-Port-Joli l’été dernier, un débordement ayant forcé une rupture de service durant 8 h. Le directeur des opérations chez Paraxion René Valois reconnaît en temps normal être capable d’éviter que cela se produise, mais que trois ou quatre paramédics supplémentaires aideraient probablement à mieux absorber ces débordements lorsqu’ils surviennent à Saint-Jean-Port-Joli.

« D’un autre côté, convertir en horaire à l’heure demande le double de personnel. Comme il y a déjà peu de paramédics, si on nous convertit tous, est-ce qu’on ne va pas accentuer le problème ? » questionne-t-il.

Salutaire

Superviseur chez Ambulances L’Islet-Sud à Saint-Pamphile, Mario Robitaille croit également qu’il est irréaliste de convertir tous les horaires de faction en horaires à l’heure. Il souligne à juste titre que certaines casernes font moins de 200 appels par année. Il reconnaît toutefois que le passage d’un horaire de faction en horaire à l’heure en 2018 a été salutaire en augmentant l’attractivité de son entreprise auprès des paramédics.

« Avant ça, la pénurie, on l’a vécue, longtemps. Maintenant, plus de jeunes cognent à notre porte pour travailler. Ils vont peut-être commencer en 7/14 (horaire de faction), mais ils savent qu’ils pourraient éventuellement tomber à l’heure », indique-t-il.

Deux à trois paramédics supplémentaires aideraient certainement la gestion des périodes de débordement qui peuvent aussi survenir chez Ambulances L’Islet-Sud. Mario Robitaille souligne néanmoins qu’en dehors de cela et des périodes de vacances estivales, le travail manquerait probablement pour eux.