Des bières plus légères à gérer sans timbre de droit

Sylvain Tremblay avec l’une de ses bières, timbrée. Photo : Courtoisie

Le timbre de droit, longtemps critiqué par l’industrie brassicole, est sur le point d’être aboli grâce au projet de loi 85. Ce marquage obligatoire sur les contenants de bière, pour différencier leur lieu de consommation, avait causé des défis logistiques et des tensions importantes pour les microbrasseries.

Le gouvernement du Québec a déposé récemment le projet de loi 85, qui vise notamment à supprimer le timbre de droit imposé aux bières des microbrasseries. Utilisé pour distinguer les bières destinées à la consommation sur place de celles à emporter, ce système a rapidement montré ses limites dans un environnement de production moderne.

« Nous sommes très heureux de voir que le message a été entendu. Ce changement allégera considérablement le fardeau administratif des microbrasseries, et leur permettra de se concentrer sur leur passion : brasser des bières de qualité », explique Marie-Ève Myrand, directrice générale de l’Association des microbrasseries du Québec (AMBQ).

Un système obsolète

Le timbre de droit, instauré à une époque où les outils de contrôle étaient limités, est devenu un véritable casse-tête pour les microbrasseries. Les timbres, souvent commandés en grandes quantités auprès d’imprimeurs, devaient être apposés individuellement, engendrant des coûts inutiles et un gaspillage de temps.

Les interventions policières associées au contrôle des timbres, parfois perçues comme intrusives, avaient également créé des tensions. « Ce règlement inutile mobilisait des ressources qui pourraient être mieux utilisées ailleurs », conclut-il.

Timbrer, c’était timbré

Sylvain Tremblay, propriétaire de la microbrasserie La Baleine endiablée de Rivière-Ouelle, décrit avec franchise ce qu’il qualifie d’absurdité liée au système du timbre de droit. Ce marquage obligatoire imposait un fardeau administratif et financier injustifiable aux microbrasseurs québécois.

« On se débarrasse enfin de ce système complètement dépassé. C’était une perte de temps, d’argent et d’énergie, affirme-t-il. Il s’agissait surtout d’une mesure bureaucratique inutile. »

Sylvain Tremblay raconte avec humour et exaspération les absurdités rencontrées. « Imagine, dans ma propre boutique, je pouvais vendre mes bouteilles sans timbre. Mais si je voulais les offrir dans mon bar, situé dans la même pièce, je devais y coller un timbre. Ça n’avait aucun sens! » dit-il, ajoutant que la commande des timbres, souvent par lots de milliers, se faisait sans véritable contrôle rigoureux.

Un fardeau lourd de conséquences

Les coûts associés au respect de cette réglementation dépassaient largement le simple achat de timbres. « Ce n’était pas juste une question de coût, mais aussi de temps perdu et de stress inutile », explique Sylvain. Il se remémore une inspection récente, où des policiers ont découvert une caisse de bière laissée en cadeau par un groupe de musiciens dans la cuisine de son établissement.

« Cette caisse n’était même pas destinée à la vente, mais parce qu’elle n’était pas timbrée, j’ai été convoqué devant la Régie des alcools. Résultat : une amende de 4000 $. Pour une petite entreprise comme la nôtre, c’est énorme », dit-il.

Au fil des années, ces visites policières répétées, parfois perçues comme intrusives, ont généré un climat de méfiance et d’anxiété. « Ils pouvaient débarquer à sept, fouiller partout, comme si on cachait des choses. C’était démoralisant », ajoute-t-il.

Des impacts sur la rentabilité

En plus des complications locales, le timbre de droit affectait les relations commerciales des microbrasseries avec leurs partenaires. Sylvain explique comment une erreur d’étiquetage peut entraîner des amendes pour les détaillants. « Si un détaillant reçoit des bières avec un timbre qui ne devrait pas être là, il doit payer quelqu’un pour les retirer. C’est un gaspillage de temps et de ressources », dit-il.

Ces contraintes poussaient les microbrasseurs à jongler constamment entre conformité et rentabilité. « On travaille sept jours sur sept, souvent douze heures par jour, pour s’assurer que tout roule. Puis, des absurdités comme ça viennent tout gâcher », déplore celui qui, en désespoir de cause, avait contacté le député Mathieu Rivest pour lui expliquer à quel point c’était un frein pour lui.

« Anne-Christine Charest [son attachée politique] m’avait répondu rapidement, en disant qu’ils travaillaient sur le dossier. C’est rare que l’on voie une réponse aussi rapide, souligne-t-il. Avec l’adoption du projet de loi 85, les microbrasseries pourront se concentrer sur ce qui compte réellement : brasser des bières de qualité, et offrir des expériences uniques à leurs clients.  Ça nous donne enfin l’occasion de respirer et de bâtir sur des bases solides, sans avoir à craindre des pénalités injustes. »