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Élections municipales : l’enjeu de la décentralisation

Photo : Artem Maltsev, Unsplash

Nos gouvernements ont beau qualifier nos municipalités de « partenaires » et de « gouvernements de proximité », légalement et en pratique, elles sont et demeurent des « créatures de l’État », et sont traitées comme telles.

Nos dirigeants municipaux ont un rôle de plus en plus important à jouer dans la prise en charge de nos territoires et de nos communautés. La mise à jour des installations pour l’eau potable, les déchets et les égouts, l’aménagement du territoire, la protection de l’environnement, l’accès au logement, aux loisirs et aux activités culturelles, le maintien des services et de la population, la prévention et la gestion des catastrophes naturelles de plus en plus fréquentes exigent des dépenses énormes, et l’appel à des firmes privées d’experts qui leur coûtent les yeux de la tête. Elles doivent quand même boucler leur budget avec des taxes insuffisantes et des subventions capricieuses, tout en se soumettant aux multiples lois et contrôles du gouvernement, à un Code municipal archaïque, et aux critiques impitoyables des citoyens. Contrairement au gouvernement, elles n’ont pas droit au déficit.

La trahison des MRC

En 1979, le gouvernement Lévesque a créé les MRC (municipalités régionales de comté) qui devaient permettre aux maires d’un territoire d’appartenance de mettre leurs efforts en commun, de se doter de services communs, et d’agir en interlocuteurs valables auprès du pouvoir central. Mais force est d’admettre que les MRC, avec leurs équipes d’experts (plus d’une trentaine à la MRC du Kamouraska), sont devenues trop souvent, dans les faits, des courroies de transmission des politiques et programmes gouvernementaux, plutôt qu’une coalition des maires et de leurs citoyens désireux de prendre en charge leur territoire et leurs communautés.

En d’autres mots, les MRC fonctionnent beaucoup en vase clos, et servent finalement davantage le gouvernement que les maires et leurs citoyens. Les schémas d’aménagement et les plans d’urbanisme, qui devaient permettre aux maires de gérer leurs territoires en fonction de leurs particularités et de leur vision d’avenir, sont devenus foncièrement des condensés des normes figées du gouvernement, que les municipalités sont forcées de transposer ensuite dans leur propre réglementation d’aménagement et d’urbanisme.

Au lieu de contribuer à décentraliser le pouvoir, les MRC ont tendance à s’inféoder au gouvernement pour profiter de ses programmes, freinant du même coup la possibilité des municipalités d’innover et de s’adapter à leur réalité propre et à leur vision d’avenir. En réalité, les maires ne décident plus grand-chose à la MRC — et les citoyens encore moins : ils sont informés de ce que fait la MRC, et invités à l’appuyer.

Libérer les municipalités et les MRC

Il faut profiter des élections de novembre pour commencer à libérer nos municipalités et nos MRC, recommencer à en faire le lieu par excellence où les communautés locales et régionales prennent en charge leur territoire et leur milieu de vie.

Depuis 40 ans, la mondialisation et le libre échange ont produit une vague de centralisation, de fusions et de bureaucratisation qui est en train de tout étouffer et paralyser. Il est temps, surtout au moment où nous devons faire face à une crise écologique et démocratique, d’inverser le mouvement.

Seules cette décentralisation du pouvoir et cette prise en charge citoyenne peuvent nous libérer de la « camisole de force » de la bureaucratie de l’État dont a parlé Legault.