Nos églises gardent leur raison d’être

L’Église de Saint-Germain. Photo : Stéphanie Gendron.

Nos églises sont et furent beaucoup plus que le lieu de culte de nos communautés paroissiales. Le déclin de la religion n’enlève rien à leur rôle et à leur signification pour la communauté.

Elles sont nos cathédrales et nos châteaux qui témoignent de notre histoire, de notre générosité, de notre savoir-faire et de notre savoir-vivre. Elles sont essentielles à l’architecture physique et collective de nos villages et quartiers.

En campagne, elles sont la pierre de voute de ce quadrillage de rangs et de terres en longueur enlignés sur le fleuve, un système de peuplement unique au monde qui a permis à nos ancêtres de s’entraider entre voisins pour survivre aux hivers et avoir accès au fleuve, « le chemin qui marche ».

En ville, elles sont le cœur des quartiers. Les silos de fermes et les tours à bureaux sont parfois aussi hauts que les clochers, mais ils ne sont pas aussi chargés de sens.

Le village — ou le quartier — est construit autour de la place de l’église et le clocher qui surplombe les maisons demeure le meilleur GPS pour s’y orienter. Les clochers et leurs somptueuses cloches ont longtemps servi de « tour satellite » pour indiquer l’heure, la messe, les naissances, les décès, les mariages, les fêtes, les catastrophes, et ils sont d’ailleurs encore convoités par les agents du 5G. Leur langage sonore fait partie de notre ADN.

Ces « maisons de Dieu », qui ont longtemps rassemblé la communauté, ont généralement été dessinées et décorées par nos meilleurs peintres et architectes ; construites et payées par les gens, elles leur appartiennent collectivement.

L’église, le presbytère, l’école, le parc, le cimetière sont les lieux où l’histoire du village, de chaque famille et de chaque citoyen est pour ainsi dire archivée, un patrimoine vivant inestimable. Désacralisés, ces lieux qui entourent la place de l’église ne sont malheureusement pas toujours des « maisons du peuple », mais elles devraient l’être.

La démocratie devrait être aussi constitutive et rassembleuse que le fut la religion. Pour ça, il faut que les autorités municipales locales et régionales, chargées de l’aménagement du milieu, y croient et s’y investissent. Ces dernières années, celles-ci se sont montrées peu empressées face aux projets citoyens pour recycler les églises offertes en vente ; et les autorités religieuses guère plus. Ce sont les groupes citoyens qui doivent souvent en porter tout le poids. Les frais d’entretien qu’exigent de tels monuments dépassent les moyens de simples citoyens.

C’est une charge qui devrait être assumée par toute la communauté locale, régionale. Occuper et habiter son territoire, l’aménager pour qu’il dure et grandisse, faire corps avec lui et ceux qui l’ont peuplé et en vivent aujourd’hui, n’est-ce pas le premier mandat des élus municipaux locaux et régionaux ?

Quelle que soit leur utilisation future, les églises doivent demeurer le phare du village — ou du quartier — et de la communauté qu’elles ont toujours été. Je salue le haut sens communautaire du Cirque de la Pointe Sèche qui adressait récemment le message suivant aux citoyens de Saint-Germain :

« Comme vous le savez, le Cirque de la Pointe-Sèche a pris récemment possession de l’église de Saint-Germain. L’équipe du Cirque souhaite que l’église continue à raisonner dans nos cœurs, mais aussi dans nos oreilles. En accord avec notre fidèle bedeau, nous vous proposons de faire sonner les cloches pour les événements marquants de vos vies tels que naissances, mariages, décès, festivités ou rassemblements du village, catastrophes, etc. »

À propos des cloches, puisqu’on est dans le temps de Pâques, qui se souvient qu’elles se taisaient durant les trois jours où Jésus était au tombeau : on disait qu’elles s’envolaient vers Rome le jeudi, après la dernière cène et le lavement des pieds, pour ne revenir que la nuit pascale, avec la proclamation de la Résurrection par le chant de l’« Exultet »…