Siège social de l’ITAQ : Consternation généralisée au Québec

Sylvain Roy et Dominique Anglade.

Le choix de Saint-Hyacinthe pour y implanter le futur siège social de l’ITAQ sème la consternation partout au Québec. Partis d’opposition à l’Assemblée nationale et élus des MRC avoisinantes au Kamouraska n’ont pas manqué de critiquer cette décision du gouvernement Legault.

Régionalement, les élus de la MRC de Montmagny ont senti le besoin de réagir en rappelant que l’accès à l’éducation était un des facteurs d’attractivité du monde rural. Selon eux, la décision du gouvernement caquiste « minimise l’importance de l’identité agricole sur le territoire ». Faire de La Pocatière le siège social officiel de l’ITAQ était une question d’identité, de principe et de traditions en lien avec le rôle important que le campus a joué dans le développement de la formation en agriculture au Québec.

« Avec le secteur manufacturier, l’agriculture est un secteur économique important dans la région et ce décret ministériel sème l’inquiétude par rapport aux orientations et décisions qui pourront être prises dans un contexte et une réalité si différente des nôtres. L’impact pourrait se jouer sur l’avenir de la relève agricole, sur la qualité et la quantité des cours offerts au campus de La Pocatière et de sa pérennité, affectant directement le portrait de la ruralité, toile de fond de ces régions foncièrement agricoles, mais également du dynamisme du milieu », peut-on lire.

La cheffe du Parti libéral Dominique Anglade et son porte-parole en matière d’agriculture Jean Rousselle ont également questionné la décision gouvernementale. Par communiqué, ils ont tous deux rappelé que la première école d’agriculture permanente de langue française en Amérique avait été fondée à La Pocatière en 1859.

« La modernisation de son statut (ITA) était bienvenue. Cependant, l’établissement du siège social de l’ITAQ à Saint-Hyacinthe, et ce, sans explications, aura nécessairement des impacts sur la vitalité du Bas-Saint-Laurent. Des voix s’élèvent, notamment pour rappeler à la CAQ l’importance de respecter les spécificités et la représentativité de nos régions qui forgent cette institution depuis tant d’années », a déclaré Mme Anglade, également porte-parole responsable de la Charte des régions au sein du parti.

Sylvain Roy, député péquiste de Bonaventure et porte-parole en matière d’agriculture, d’alimentation et d’enseignement supérieur, a quant à lui déploré que la CAQ ne respecte pas sa prétention de vouloir régionaliser les directions des organisations publiques en perpétuant le choix d’un milieu urbain au détriment d’un milieu rural. Cette préoccupation s’ajoute à celle des grandes orientations stratégiques de l’ITAQ qu’il craint voir contaminées par « Saint-Hyacinthe » où se concentrent les gros joueurs de l’industrie agricole conventionnelle.

« C’est par l’éducation et la formation qu’on peut changer les choses. Une institution comme l’ITAQ a un rôle fondamental à jouer dans la transition vers une agriculture durable que le ministre (André Lamontagne) dit pourtant vouloir opérer. Pas sûr que Saint-Hyacinthe va prioriser les demandes sociétales de transition en agriculture. La Pocatière aurait été susceptible d’amener davantage un modèle innovant en agriculture à travers l’ITAQ », a-t-il déclaré.

Comme les élus du Kamouraska, il souhaite non seulement une présidence issue de la Côte-du-Sud sur le conseil d’administration, mais quelqu’un qui s’inscrit dans cette idée de transition vers une agriculture durable. « On va surveiller de près les nominations partisanes qui pourraient survenir sur le conseil d’administration », poursuit-il.

Syndicat

Ces craintes du député Sylvain Roy s’ajoutent à celles du Syndicat des professeurs de l’État du Québec qui dans une lettre ouverte a dit s’inquiéter des nominations futures au sein de l’organisation, notamment aux postes clés que sont la direction générale et la direction des études. Le président du Syndicat Jean Vallières et le représentant local Benoît Garon écrivent que « la perspective que ces gestionnaires soient issus de la présente structure du MAPAQ soulève de sérieux questionnements ».

« Plusieurs redoutent qu’on transpose dans le nouvel ITAQ un mode de gestion devenu périmé, trahissant l’esprit de la réforme et hypothéquant ainsi pour longtemps le renouveau tant attendu par tous. »

Selon eux, des décisions prises récemment de façon unilatérale par les gestionnaires actuels de l’ITA, notamment par des fusions d’équipes entre des enseignants de matières spécialisés et d’autres en formation générale font craindre que l’enseignement général soit éventuellement livré en « commandite » aux cégeps. Si tel était le cas, la cohésion institutionnelle qu’ils jugent indispensable dans la qualité de l’enseignement offert serait directement affectée.