Un référendum est nécessaire sur le projet de tramway à Québec

Photo : Ville de Québec

Non, vous n’assistez pas à une mauvaise pièce de théâtre d’été, le premier ministre du Québec, François Legault s’engage de nouveau à construire un pont à l’est pour les automobiles et les camions, en plus de réaliser la première phase du projet de tramway à Québec. En effet, après que son gouvernement ait enterré le volet autoroutier en avril 2023 pour ensuite ressusciter le projet à la suite de la cuisante défaite aux mains du Parti Québécois dans la partielle de Jean-Talon, le voilà promettre encore une fois le troisième lien, sans pour autant en préciser le coût ni l’échéancier.

M.Legault se dit désormais préoccupé par les conclusions du rapport de CDPQ Infra indiquant que si le pont Pierre-Laporte venait à être fermé pour une période prolongée, environ 10 500 camions de marchandises par jour devraient utiliser le pont Laviolette à Trois-Rivières pour se rendre dans la capitale nationale. Certes, mais avec cette logique, en est-il de même pour la sécurité économique de Trois-Rivières, avec son unique pont?

Il est quand même étonnant de constater que cet argument d’ordre économique vient tout juste de sauter aux yeux du premier ministre alors que, dans d’autres études précédentes, cet élément a déjà été soulevé. Qui plus est, ce qui est encore plus surprenant, c’est que le gouvernement n’a pas considéré la possibilité d’abaisser le tablier routier du pont de Québec pour y faire circuler les marchandises — idée soulevée récemment par le ministre fédéral Jean-Yves Duclos, et connue depuis, semble-t-il, belle lurette. Toutefois, on assure du côté du cabinet de la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, qu’abaisser le tablier en question ne permettrait pas d’augmenter le dégagement vertical assez pour le passage des poids lourds… Qui dit vrai?

Le tramway

Le projet de tramway a été abandonné en novembre dernier par le gouvernement Legault, au prétexte que les coûts étaient trop élevés, car ceux-ci étaient désormais évalués à près de 11 G$, le maire Marchand disant pouvoir réaliser le tramway de 19 km pour 8,4 milliards, alors qu’on parlait à la base de 3,3 G$. L’appui au tramway à Québec était aussi uniquement de 36 % en novembre dernier. Le dossier fut ensuite confié à la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) pour que celle-ci arrive avec le meilleur projet structurant pour la Ville de Québec, et à juste coût.

À cet égard, récemment, la CDPQ a annoncé que la première phase du projet coûterait 7 milliards de dollars à réaliser, pour 28 km de trajet. Mais l’organisme propose également un plan beaucoup plus vaste, incluant un tunnel Québec-Lévis réservé au transport en commun, pour un total de 15,4 G$. Si le projet devait aller de l’avant, ce qui semble le cas, la fabrication des rames aurait entièrement lieu chez Alstom à La Pocatière, ce qui est une excellente nouvelle pour l’économie en Côte-du-Sud.

Pas de majorité pour le tramway

Dans cette nouvelle annonce, le gouvernement du Québec semble ménager la chèvre et le chou en tentant de plaire aux partisans du tramway et à ceux désirant un troisième lien. Cependant, selon un coup de sonde SOM-Le Soleil réalisé dans les derniers jours, 45 % des citoyens de la grande région de Québec se montrent désormais plutôt (18 %) ou totalement (25 %) favorables à un projet de tramway dans la capitale, alors que 52 % se disent plutôt (17 %) ou totalement (35 %) défavorables audit projet. À l’inverse, selon le même coup de sonde, le projet de troisième lien récolte 76 % de la faveur du public, ce qui représente 62 % des sondés affirmant qu’on en a certainement besoin, et 14 % qui dit probablement.

Un référendum est nécessaire

Le chef du Parti conservateur du Québec, Éric Duhaime souhaite quant à lui un référendum sur la question du tramway car, dit-il, « les gens de la région n’en veulent pas ». Selon lui, en plus de ne pas obtenir l’appui de la population, le coût pour la mise en place d’un tramway est trop élevé, en raison notamment de l’inflation galopante qui appauvrit présentement la collectivité, des taux d’intérêt trop élevés qui étouffent les ménages, et du déficit de 11 milliards $ du gouvernement du Québec. Et vous savez quoi, il a totalement raison!

Imaginez, on parle ici d’un projet évalué à 15,4 milliards de dollars, et en même temps, on souhaite un troisième lien à l’est qui nous coûtera encore quelques milliards, tout en construisant un nouveau pont sur l’Île d’Orléans au montant de 2,7 G$. Ce n’est pas tout. Au même moment, la Ville de Montréal souhaite mettre sur pied un vaste réseau de tramway de près de 200 kilomètres pour desservir la majorité de son territoire d’est en ouest d’ici 2050… Québec posséderait-il un bas de laine dissimulé de plusieurs milliards de dollars, ou envisage-t-on ultérieurement de nous taxer davantage?

C’est vrai également que nos infrastructures scolaires et nos hôpitaux sont en bon état! J’oubliais aussi le 878 M$ qui sera investi pour la réfection du toit du Stade olympique… Sans compter les innombrables et immenses dépassements de coûts qui auront lieu possiblement dans tous ces projets. Rappelez-vous le 25 M$ pour la SAAQclic, qui a finalement coûté 20 fois le prix (500 M$). Je vous laisse faire le calcul pour le reste…

Qui plus est, bien que cela puisse changer, tout indique que les conservateurs prendront le pouvoir au Canada en 2025, et leur chef Pierre Poilievre a clairement indiqué que le fédéral ne mettra pas « une cenne » dans le projet de tramway à Québec.

Mais, au-delà de l’aspect économique, le plus important demeure l’aspect démocratique. En démocratie, ce qu’officiellement nous sommes encore, le pouvoir appartient au peuple. Lorsqu’il y a une vive opposition palpable et confirmée à un projet, comme dans le cas présent, et que le projet concerné récolte moins de 50 % des appuis populaires, le processus référendaire devient d’emblée la meilleure manière de trancher la question. Il faut ainsi faire appel à la sagesse du peuple, comme il se doit dans de telles circonstances!

Et si finalement le peuple disait oui, et ce, malgré la pléthore d’arguments contre, la démocratie se serait exprimée, pour le meilleur ou pour le pire. En contrepartie, si les instances gouvernementales vont de l’avant avec la construction du tramway sans avoir consulté au préalable la population, nous serions dans notre bon droit de nous demander si nous sommes véritablement encore en démocratie…