Crise de l’eau potable, refoulement d’eaux usées, explosion des coûts pour le projet de centre communautaire, mais aussi pour celui à venir à l’aréna. Les aléas se succèdent à Saint-Pascal depuis l’été dernier, laissant un goût amer chez les citoyens, dont plusieurs ont dû encaisser récemment une hausse non négligeable des taxes municipales avec l’entrée en vigueur du nouveau rôle d’évaluation. Dans une entrevue exclusive, la mairesse Solange Morneau a accepté de revenir sur ces événements qui alimentent depuis une forme de mécontentement au sein de la population pascalienne.
Le Placoteux (LP) : Mme Morneau, Saint-Pascal semble être à un tournant. Des investissements majeurs sont nécessaires à plusieurs infrastructures appartenant à la Ville, mais les coûts, eux, sont plus élevés que jamais. Le Centre communautaire Robert-Côté en est un bon exemple. L’attente accumulée dans la réalisation du projet a fait grimper les coûts de 155 %. Un projet plus modeste aurait-il été possible?
Solange Morneau (SM) : Le projet est déjà modeste comparativement à ce qui était souhaité initialement. Il faut dire que lorsque je suis arrivée en poste, comme mairesse, le travail était déjà commencé. Dès la présentation des premiers plans, nous avons carrément demandé aux architectes de refaire leurs devoirs, car le projet était beaucoup trop coûteux. À trois reprises, nous les avons retournés à la table à dessin pour en arriver au projet actuel. Mais pour ça, il a fallu couper dans beaucoup de choses; la cuisine, la bibliothèque.
LP : Le montant global [NDLR travaux, plans et devis, services techniques] est tout de même de 8 148 370 $. Pourquoi ne pas avoir tout simplement arrêté le projet?
SM : Quand on a décidé de faire l’appel d’offres, l’estimation du projet par les architectes était de 5 M$. Comme tout le monde, on a été victime de l’explosion des coûts, et la soumission la plus basse est sortie à 7 M$. Si on revenait en arrière, on perdait notre aide financière initiale de 2,2 M$, et il aurait fallu redéposer le projet dans un autre programme gouvernemental, avec les risques que les coûts augmentent encore, et sans garantie d’obtenir le financement souhaité. Quand on sait l’état dans lequel le centre communautaire était rendu à la fin, le conseil se devait de prendre une décision. Comme le centre communautaire était la priorité de la dernière planification stratégique, on a décidé d’aller de l’avant.
LP : Le directeur général de la Ville, Jean Langelier, a mentionné l’automne dernier que Saint-Pascal était à la recherche d’un commanditaire qui pourrait apposer son nom au centre communautaire afin de diminuer la facture des Pascaliens. Des approches ont-elles été faites jusqu’à maintenant?
SM : Oui, mais nous ne pouvons pas nous avancer pour le moment. Nous sommes accompagnés dans ce processus, je tiens à le dire, et nous sommes sûrs que nos recherches seront fructueuses.
LP : Après le centre communautaire, il y a aussi le centre sportif (aréna) qui a besoin d’une cure de jouvence. Là encore, le retard accumulé dans la concrétisation du projet a fait passer les coûts de 5 à 11 M$ en l’espace de huit ans. Le projet est-il encore justifié?
SM : Des choses ont déjà été faites au centre sportif dans les dernières années : les estrades, le remplacement du système de réfrigération, l’amélioration de l’éclairage, mais il y a encore beaucoup de choses à compléter.
Le nœud du problème, auquel on doit maintenant s’attaquer, c’est l’accueil. À l’ouverture officielle du dernier Tournoi Pascot, il y avait plus de 600 personnes cette année, et tout ce que nous avons, c’est six toilettes : trois pour hommes, trois pour femmes. Évidemment, ça ne convient plus. L’accès aux personnes à mobilité réduite est aussi difficile. Et seulement pour les vestiaires, l’espace n’est plus adapté aux besoins d’aujourd’hui. Prenez seulement les joueurs de hockey, l’équipement nécessaire pour le jeu a probablement quadruplé depuis 50 ans!
C’est la troisième fois qu’on dépose le projet à un programme d’aide financière gouvernementale qui permettrait de payer les deux tiers de la facture. Si nous ne sommes pas retenus maintenant, on va devoir encore attendre, mais les coûts, eux, vont augmenter quand même, peu importe l’ampleur du projet.
LP : Ce contexte d’explosion des coûts pour les projets d’infrastructures donne-t-il encore le goût à la Ville de Saint-Pascal de se doter d’une piscine municipale?
SM : Ce ne sera pas demain matin. L’idée fait partie de la dernière planification stratégique, et comme on a eu accès à une aide financière pour mettre à jour une précédente étude de faisabilité, on en a beaucoup jasé. En plein hiver, à -30 °C, les gens m’arrêtaient dans la rue ou dans les commerces pour m’en parler, ce n’est pas des blagues! Mais le besoin a aussi été amplifié par le fait que la piscine municipale à Mont-Carmel n’accueille plus les baigneurs des autres municipalités, et parce que celle du cégep de La Pocatière n’a pratiquement pas été ouverte depuis quatre ans. Mais les gens doivent être conscients qu’une piscine extérieure, qui pourrait être utilisée pratiquement trois saisons, et qui serait aussi accessible même aux personnes à mobilité réduite, c’est environ 3 M$ en date d’aujourd’hui. Ça reste une belle idée, mais pour le moment, ce n’est pas une priorité.
LP : L’eau a donné du fil à retordre à Saint-Pascal dans les dernières années. Certains secteurs ont goûté à une eau très ferreuse, ce qui n’a pas manqué d’occasionner de multiples conséquences dans leurs domiciles. Qu’en est-il aujourd’hui?
SM : Dans les secteurs qui étaient plus problématiques, comme les rues Desjardins, Saint-Joseph et Saint-André, des correctifs ont été apportés, et d’autres sont encore à venir. On invite encore les gens à vider leur chauffe-eau à l’occasion, mais la qualité de l’eau est bonne, elle est consommable. Parfois, on a des critiques quant à l’odeur de l’eau, mais plusieurs facteurs peuvent influer, comme la tuyauterie de la maison, par exemple. Le cas échéant, on invite les gens à laisser couler l’eau un peu plus longtemps.
LP : Et pour l’usine d’eau potable, où un bris a occasionné de gros problèmes d’approvisionnement, l’été dernier, des correctifs doivent-ils être apportés dans la gestion et le traitement de l’eau?
SM : Notre usine de traitement des eaux a 23 ans. Certains produits chimiques utilisés ont été rebalancés, ce qui fait que l’eau du réseau d’aqueduc n’a pas été à son meilleur sur le plan visuel durant un moment. Le bris à l’usine est survenu à la suite du bris de la pompe de nettoyage, qui fonctionnait davantage l’an dernier en raison de fortes pluies qui ont occasionné une présence accrue de matières en suspension lors du traitement de l’eau potable. Depuis que la pompe a été remplacée et que la situation est rentrée dans l’ordre, on a demandé un audit afin de savoir si l’usine et les puits étaient en mesure d’affronter une situation comme celle vécue l’été dernier, où il y a eu un gonflement de la rivière Kamouraska. L’audit a conclu que notre usine est en mesure de faire face à cette force-là.
LP : Au même moment où les citoyens de Saint-Pascal devaient conjuguer avec un approvisionnement moindre en eau potable, certaines résidences de l’avenue Sergerie et des rues Blondeau et Saint-Elzéar ont été victimes de refoulements dans leurs sous-sols, à la suite de pluies diluviennes. La Ville de Saint-Pascal prévoit-elle revoir prochainement les infrastructures souterraines de ces rues?
SM : L’avenue Chapleau et les rues Blondeau et Saint-Elzéar sont les prochaines priorités de notre plan d’intervention. Des travaux devaient avoir lieu l’an dernier, mais lorsqu’on a procédé à l’appel d’offres, les soumissions sont sorties trop hautes, autour de 12 M$. Si on avait procédé aux travaux, on se serait retrouvé dans une situation où la Ville de Saint-Pascal aurait payé environ 80 % de la facture, et le gouvernement 20 %, alors que ça devrait plutôt être le contraire. On a parlé depuis avec des représentants du gouvernement, et il semblerait que le prochain programme serait plus généreux. Si nous sommes en mesure d’avoir les sommes escomptées, les travaux pourraient se faire au courant de 2025.
LP : En savez-vous davantage sur les raisons derrière ces refoulements?
SM : Nous avons passé des caméras dans les tuyaux des secteurs touchés, et nous attendons toujours les résultats. Ces informations pourraient changer la nature des travaux qui devraient être réalisés, mais aussi le financement gouvernemental qui accompagnerait les travaux. Je comprends les citoyens qui trouvent que nous n’allons pas assez vite à leur goût, mais nous n’avons pas d’autre choix que de suivre les normes gouvernementales pour ce type de travaux. Nous procédons par étapes, et les citoyens doivent être rassurés, ces rues sont prioritaires.
LP : De toute évidence, Saint-Pascal est confrontée à un problème d’infrastructures vieillissantes qui l’oblige à faire des investissements importants dans les prochaines années. Les Pascaliens doivent-ils craindre pour la dette de la Ville, dans ce contexte?
SM : Saint-Pascal a actuellement une dette de 8,8 M$. Depuis que je suis en poste, je n’entends que des félicitations de la part de notre firme comptable quant à la bonne gestion financière de la Ville. Sur l’ensemble de notre budget, moins de 8 % de nos dépenses sont consacrées au service de la dette. Nous nous comparons avantageusement à d’autres municipalités similaires à la nôtre, pour qui ce pourcentage frôle les 11, voire les 15 % dans certains cas. Tout cela nous dit qu’il faut continuer une bonne gestion des fonds publics, mais que nous avons aussi une certaine marge de manœuvre pour faire face aux projets qui nous attendent.