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Un autre gouvernement minoritaire ?

Photo: Wikimedia Commons

Il faut se le dire, la dernière élection fédérale au Canada en a été une qui ne ressemblait pas aux précédentes. Non seulement la question de l’urne était directement liée à notre voisin états-unien par la peur du président Donald Trump, mais elle a également fortement démontré une multitude d’incohérences de la part des Canadiens, mais surtout des Québécois.

On se souvient que, naguère, les Québécois votaient massivement pour le Parti québécois de René Lévesque au provincial, tout en élisant majoritairement les libéraux de Pierre-Elliot Trudeau au fédéral. Bien, cette année, la même chose s’est produite alors que beaucoup d’électeurs bloquistes se sont tournés vers le Parti libéral de Mark Carney afin de se faire « protéger » du méchant Donald…

Pourtant, avant que le président Trump impose ses menaces tarifaires tout en parlant d’un 51e État en annexant le Canada, les conservateurs de Pierre Poilièvre avaient le vent dans les voiles. Il était par ailleurs aisé de faire culbuter le gouvernement Trudeau, car ce dernier ne faisait qu’empiler les fiascos.

En effet, sous l’ère de Justin Trudeau, la dette fédérale a plus que doublé, passant d’environ 600 milliards de dollars en 2015 à plus de 1200 milliards maintenant, alimentée par des dépenses massives — notamment durant la crise covidienne — mais aussi entachée par une série de scandales qui ont soulevé des doutes sur la rigueur et l’éthique du gouvernement.

Parmi ceux-ci, le voyage non déclaré chez l’Aga Khan, l’affaire SNC-Lavalin, l’immigration hors de contrôle, l’attribution controversée d’un contrat de 912 M$ à WE Charity impliquant des proches de Trudeau, le gaspillage de fonds publics dans le programme vert TDDC, les révélations sur des ingérences étrangères dans les élections, l’ancien soldat nazi, le scandale de système de paie Phénix, ayant coûté plus de quatre milliards de dollars, les droits et libertés bafoués de citoyens ayant manifesté à Ottawa, etc. Ce ne sont pas les exemples qui manquent.

Pourtant, 43,7 % de la population canadienne a voté pour le PLC de Mark Carney, alors que ce dernier promettait davantage de dépenses que son prédécesseur dans des circonstances inflationnistes où tout coûte une fortune…  Pourquoi ?

Sans mettre tout sur le dos des médias traditionnels, certains ont activement fait la promotion de Mark Carney durant la campagne. À titre d’exemple, rappelons que le 5 avril dernier, le chef libéral a annoncé son intention d’ajouter 150 millions de dollars à un budget de 1,4 milliard de dollars pour CBC/Radio-Canada, dans le cadre d’un plan plus vaste visant à défendre l’identité canadienne. La peur du président Donald Trump a également été très bien instrumentalisée par le Parti libéral, et aussi, avouons-le, par la société d’État… Du hasard ?

Du coup, le Parti libéral qui gisait dans la cave s’est subitement transformé en un parti nationaliste canadien capable de défendre ses frontières contre vents et marées, alors que pendant l’ère Trudeau, Justin parlait du Canada comme étant le premier État postnational du monde…

Au Québec, les libéraux sont donc passés de 35 à 44 sièges, tandis que le Bloc québécois a vu ses sièges diminués à 22, alors qu’il en possédait 32… Eh oui, c’est au Québec que le PLC a connu sa plus grande croissance au Canada, même si Mark Carney peinait à bien parler français, et qu’il est un centralisateur ayant dit non aux demandes de Québec…

Ainsi, le Parti libéral forme un gouvernement minoritaire avec 169 sièges, soit seulement trois de moins que la majorité absolue, mais il pourra sûrement s’assurer aisément de la majorité en question en ayant l’appui du NPD (sept sièges).

Pourtant, si le Bloc québécois avec son chef qui est très talentueux, mais qui possède également un certain ego, avait fait tomber le gouvernement Trudeau avant les Fêtes, sa formation politique serait possiblement en meilleure posture avec près de 40 députés élus sur 78 au lieu d’en avoir perdu 10, avec cependant un gouvernement conservateur majoritaire… Mais bon, quand l’indépendance du Québec est accessoire, et que le fonctionnement du Canada et l’adhésion à des politiques de gauche priment, on risque de se retrouver avec quelques mauvaises surprises…

Localement

Je dois l’admettre, le candidat libéral dans la circonscription de Côte-du-Sud–Rivière-du-Loup–Kataskomiq–Témiscouata a fait une très bonne campagne. Rien de surprenant ici si je vous dis que celui-ci a eu l’aide d’ex-organisateurs conservateurs chevronnés qui sont réputés pour être des vieux renards de la politique.

De plus, Rivière-du-Loup étant la métropole du comté, le dernier député venant de la MRC de RDL était le progressiste-conservateur André Plourde, ayant connu la défaite en 1993 face au bloquiste Paul Crête.

Ainsi, la montée du PLC au national pouvait laisser croire à une possible victoire locale pour Rémi Massé qui est, rappelons-le, un ancien député libéral expérimenté de l’Est-du-Québec et un fier Louperivois. En somme, tous les ingrédients étaient présents pour que le Parti libéral réussisse à ravir le comté à Bernard Généreux, en jouant notamment sur la carte du pouvoir.

Mauvaise lecture

Bien que certaines planètes étaient alignées pour une victoire libérale, l’organisation de Rémi Massé a commis une erreur de débutant dans son pointage. Non seulement le pointage obtenu par une machine politique pendant une campagne n’est jamais fiable, mais la machine libérale locale a malheureusement pris ces informations comme du « cash », tout en sous-estimant Bernard Généreux.

En somme, les gens sondés directement par un parti politique ne disent pas toujours la vérité, de sorte que l’on doit couper le tiers, voire la moitié de ce que le pointage indique, contrairement à des maisons de sondage indépendantes. Voyez-vous, le PLC dans le secteur de Montmagny obtenait quatre électeurs sur dix, ce qui leur laissait croire à un possible 40 %, et ce, avec des chiffres plus élevés à l’est; alors que le pointage pour Bernard Généreux lui octroyait entre sept et huit électeurs sur dix dans plusieurs endroits de la circonscription.

Si vous regardez le résultat final, bien que les données varient dans chaque MRC du comté, et que l’ouest de la circonscription soit davantage enclin à voter conservateur alors que l’humeur politique de la population de l’est est plus variable, le PLC a récolté 30 %, alors que le PCC a remporté 46 % des voix exprimées.

Voilà pourquoi l’équipe de Rémi Massé croyait fortement en ses chances de ravir le château fort des conservateurs. Mais force est de constater que le travail de terrain réalisé depuis plus de dix ans par M. Généreux l’a complètement enraciné, de sorte qu’il aurait fallu une véritable vague rouge, et du même souffle une déconfiture conservatrice pour que le député sortant perdre son siège.

Les pourcentages de vote par municipalité devraient être bientôt disponibles sur le site d’Élection Canada pour une analyse plus approfondie du résultat de l’élection dans la circonscription.