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Je cuis, donc je suis !

Illustration : ChatGPT

Quelles belles vacances ! Un mois en ligne, c’est en même temps long et pas. Quand on a en tête qu’en vacances, il faut aller voir ailleurs, ça finit par coûter cher. Mais ne rien faire, surtout avec chaleur et piscine, on s’y habitue.

J’ai toujours aimé la chaleur. Tout jeune, avec la voisine, on passait nos journées à « se faire griller » sur l’herbe en chantant des succès disco. À peu près tous les chanteurs qu’on écoutait sont morts. Je ne comprends pas que malgré cela, je demeure une tite jeunesse. À l’époque, à 25 degrés, on trouvait qu’il faisait ben chaud. On se levait juste pour tourner de bord comme des poulets sur le BBQ. C’était l’été parfait. Astheure, à 40 degrés… « le poulet aurait cramé », diraient nos cousins français.

Je croyais avoir goûté à l’extrême lors d’un été à Las Vegas en 2018. La vallée de la Mort portait si bien son nom qu’elle était fermée. Sérieux. Il faisait 43 degrés. Sec. Sec, mais chaud. Mais sec, mais CHAUD. Mais sec, mais très très très chaud. Pas de bas, pas de vent. C’est le désert. J’aurais dû m’y attendre…

L’endroit détient le record mondial de chaleur, avec 56,7 °C. C’était en 1913. Bon, je viens de fournir une arme aux complotistes climatosceptiques. « Y faisait aussi chaud y a 100 ans ». Ah ! pis pensez donc ce que vous voulez. Vous serez les premiers à vouloir embarquer dans l’arche quand la planète menacera de vous faire fondre. Revenons à Vegas.

Franchir les dix pieds qui séparaient la porte de l’hôtel de la piscine était impossible sans se brûler les pieds. Juste à côté de la porte, ils vendaient des gougounes… J’ai acheté. Vous croyez Céline heureuse dans son domaine ? En spectacle, elle disait être tellement contente de revenir au Québec pour marcher pieds nus dans le gazon. Parce qu’à Vegas, le gazon est en plastique. Et avec un tout petit peu plus de cette chaleur, Céline s’enfoncerait dans le faux gazon qui fond sur la musique de Titanic qu’elle chanterait elle-même.

Rideaux fermés

Un jour, en Floride, j’ai découvert une autre face de la chaleur. La peur. J’étais chez une amie, avec vue sur la mer, piscine sur le toit, palmiers plantés dans le béton, la petite vie normale de tout humain qui se respecte, quoi. Alors que j’étais en quête de soleil et de chaleur, les rideaux opaques restaient tirés toute la journée. Il ne fallait pas laisser entrer la chaleur d’enfer. Aussi, pas question d’aller à la plage avant 15 h. Trop chaud. Je ne comprenais pas. La semaine dernière, ici, je me suis surpris à faire la même chose, et demeurer à l’intérieur en embrassant ma thermopompe. J’ai compris.

À la longue, Cartier a fini par naviguer à l’envers de l’hiver. Quand l’humidex frôle les 40, j’ai une pensée pour les Montréalais coincés dans un trois et demi sans air climatisé, avec un ventilateur qui brasse l’air chaud. La rue Sherbrooke n’est pas bordée de cocotiers avec des tas de perroquets dessus, le mont Royal n’est pas couvert de bananiers avec des petits singes qui se balancent. Désolé, Charlebois. Nous, on est chanceux, assis au bord du fleuve. Fait frais. Mais le fleuve aussi se réchauffe, paraît. Dire qu’il est né de la fonte des glaciers…

Je suis allé deux fois en Gaspésie en juillet. J’ai jamais gelé autant de ma vie. Et voilà que la semaine dernière, la Gaspésie enregistrait des chaleurs records. Il y faisait plus chaud que partout au Québec. À ce rythme-là, les homards vont rester dans l’eau. Mais comme la mer aussi se réchauffe, on va finir par les pêcher déjà cuits.

La chaleur, c’est comme la gloire : on en rêve, on la désire, on se dit qu’on en prendrait tous les jours. Puis elle arrive pour vrai, s’installe, et l’on se surprend à compter les jours avant que ça finisse, pour ensuite recommencer à chialer qu’y fait frette.