Le budget de l’An un d’un Québec indépendant présenté par le Parti québécois a récemment été dévoilé à la population, et force est de constater que l’exercice a été généralement bien reçu. Le document en question est crédible, quoique certaines données demeurent contestables.
Rien de nouveau ici sous le soleil concernant la viabilité économique d’un Québec souverain, puisque cet état de fait a naguère été confirmé par les fédéralistes eux-mêmes, en l’occurrence Jean Charest et Philippe Couillard, deux anciens chefs du Parti libéral du Québec (PLQ), pour ne nommer que ceux-ci.
Par contre, il était quand même amusant de regarder se démener le premier ministre du Québec sur cette question, lui qui était à l’origine du même exercice en 2005 alors qu’il portait le chapeau de porte-parole responsable des finances dans l’opposition péquiste.
Ainsi, François Legault n’a pas eu le choix de dire qu’un Québec indépendant était viable économiquement, puisque Paul Saint-Pierre Plamondon a essentiellement repris l’argumentaire jadis recensé par l’actuel premier ministre.
Legault qui se dit désormais nationaliste, mais à l’intérieur du Canada, a toutefois été dans l’obligation de réitérer les célèbres arguments de ceux qu’il pourfendait à l’époque afin de justifier sa position.
Le chef péquiste n’a bien entendu pas laissé passer une telle occasion, et a retourné à l’envoyeur — avec un sourire en coin — les contradictions de François Legault, plaçant ce dernier sur la défensive alors qu’il a été lui-même, dans un passé pas si lointain, un souverainiste dit « pressé ».
Il fallait également écouter les commentateurs politiques nationaux d’allégeance fédéraliste nous sortir la pléthore d’arguments vides datant des années 1980 pour justifier leur position, tels la possibilité de perdre des sièges sociaux ou bien l’argument marteau de perdre les montagnes Rocheuses, pour comprendre aisément que les partisans du Québec dans la fédération canadienne n’ont visiblement pas renouvelé leur argumentaire face à une nouvelle « menace indépendantiste » qui, avouons-le, est revenue de presque nulle part.
Qui plus est, à l’époque du deuxième référendum en 1995, le gouvernement libéral fédéral était mené par Jean Chrétien — un batailleur et une farouche bête politique — qui, malgré ses quelques bourdes à l’intérieur des frontières, était très respecté par les autres chefs d’État alors que le Canada jouissait, à cette époque, d’un prestige international et d’une réputation qui faisait l’envie de bien d’autres contrées.
Désormais, avec Justin Trudeau à la tête du Canada, la situation économique et politique du pays a complètement changé. Depuis 2015, la dette canadienne a littéralement doublé (1315 milliards $). Il y a également 40 % plus de fonctionnaires, alors que les services ne s’améliorent pas et qu’il y a pénurie de main-d’œuvre.
On peut aussi se rappeler le programme de paye Phénix, un simple programme informatique qui a coûté au trésor canadien près de deux milliards de dollars, et ce, pour finalement n’obtenir qu’un canard boiteux.
Nous pouvons aussi parler des nombreuses bourdes à l’international du Canada, dont la plus récente : l’ovation debout à la Chambre des communes d’un ancien nazi ukrainien qui nous a valu collectivement d’être la risée de la planète — et avec raison — pour le manque flagrant de culture générale de nos élites politiques, en plus de fournir sur un plateau d’argent un argument en appui à la propagande russe qui justifie l’invasion de l’Ukraine comme étant un processus de dénazification.
Bref, le Canada de Justin Trudeau n’est pas celui de l’époque de son père, ni celui de Brian Mulroney ou encore de Jean Chrétien. Ainsi, sortir l’argumentaire que le pays fait toujours l’envie de la planète est à mon sens fallacieux, car la réalité a de loin rattrapé l’écho d’un passé malheureusement révolu pour l’instant.
Par ailleurs, l’argumentaire relié au fait qu’on ne ferait plus partie du G7 si le Québec devenait un pays tient de moins en moins la route, car nous assistons actuellement à de gros bouleversements politiques où le BRICS, un groupe de cinq pays comprenant le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud, a de plus en plus d’influence sur la planète.
En d’autres termes, nous assistons à la fin de la domination occidentale unipolaire, avec en tête les États-Unis, pour un monde multipolaire. Par ailleurs, le Québec possédant d’abondantes ressources naturelles, beaucoup de pays dits émergents et se développant à grande vitesse — dont l’Inde qui compte plus d’un milliard d’individus — nécessiteront de plus en plus de ressources dont nous disposons à la tonne.
Les États-Uniens seront d’ailleurs toujours prêts à travailler avec le Québec, et ce, en raison de sa proximité et de sa situation politique modérée. Cette vérité immuable en politique internationale, soit qu’un pays défend toujours en premier lieu ses intérêts, est et sera toujours la norme…
En somme, la problématique des ententes de libre-échange ne tient pas la route, surtout lorsqu’on parle d’intérêts nationaux où il y a de bonnes affaires à conclure.
L’indépendance avec tout le monde
Le Parti québécois est fortement en train de reprendre du poil de la bête. Avec sa victoire écrasante à la partielle de Jean-Talon, son « stunt » politique du serment au roi, et maintenant sa sortie bien réussie sur le budget de l’An 1 d’un Québec souverain, sans parler du travail de Paul Saint-Pierre Plamondon, le PQ est, selon mon point de vue, sur la bonne voie.
Par contre, pour faire l’indépendance du Québec, le Parti québécois qui, rappelons-le, n’a que quatre députés élus, doit cesser de miser exclusivement sur un discours de gauche à saveur environnementaliste, et doit inéluctablement se remettre à écouter le peuple. Accuser le Canada d’être un pétropays, alors que tous usent de cette ressource naturelle, est selon moi non-constructif et exclusif, bien que cette industrie soit loin d’être sans tache.
Combien d’indépendantistes ne se reconnaissent pas dans le discours du PQ? Combien d’indépendantistes voulant que le Québec se développe davantage votent pour d’autres partis que le PQ? Il y a bel et bien quatre axes au Québec en raison de son histoire : fédéraliste et souverainiste, gauche et droite.
Si l’objectif premier est de faire l’indépendance, le Parti québécois, qui a dans son ADN le peuple, doit rapidement se reconnecter sur lui et non tenter de lui faire la morale par son discours à la sauce verte. La priorité des priorités actuelles, pour l’ensemble des Québécois, demeure l’inflation galopante. D’ailleurs, si le PQ souhaite la liberté collective, pourquoi avait-il le nez collé dans le derrière du gouvernement Legault lorsque celui-ci ne respectait pas les libertés individuelles pendant la crise covidienne? Rappelons-nous le dernier couvre-feu annoncé en alerte Amber le 31 décembre 2021, une mesure drastique qui ne reposait sur aucune étude concluante. Où campait le PQ à ce moment?
Depuis le départ de Bernard Landry à la tête du Parti québécois, les hautes instances ou les stratèges de cette formation politique ont visiblement oublié l’une des règles de base en politique : additionner au lieu de soustraire. On peut ici se rappeler que Lucien Bouchard avait été hué par des partisans, alors que ce dernier avait la même conclusion que celle que je vous expose aujourd’hui : l’indépendance ne se fera pas à gauche, mais avec tous les nationalistes du Québec, que ce soit de gauche, de centre ou bien de droite. La couleur des murs de la maison, c’est une fois qu’elle est construite qu’on la décide.
Ne comptez par ailleurs pas sur Québec solidaire pour faire la promotion de l’indépendance, car c’est possiblement sa 42e priorité…
La nécessité de l’indépendance, selon moi, doit être plus profonde que les dédoublements de juridiction et la possibilité de perdre les Rocheuses ou encore des sièges sociaux. Il s’agit davantage d’une question de survie pour la nation québécoise.