Les prochaines semaines, trêve de politique étrangère ! Nous fêtons le Québec, le pays du Québec, la nation québécoise, NOUS, Québécois autochtones, d’origine et d’adoption. Solstice d’été (21 juin), Saint-Jean ou fête nationale (24 juin) et fête du Canada (1er juillet) – pour ceux qui rêvent encore des Rocheuses : le temps des iris ! Il faut vivre dans un pays où c’est l’hiver six mois par année pour apprécier le retour du Soleil et de l’été.
On peut se demander cependant pour combien de temps encore nous allons pouvoir fêter le Québec, car les menaces se multiplient sur notre village gaulois.
À chaque fois que les Anglais ont vu leur emprise sur le Canada menacée, ils ont trouvé moyen de resserrer davantage l’enclave canadienne sur notre peuple. Face aux patriotes qui rêvaient d’une République du Bas-Canada : l’Acte d’union des deux Canada. Face aux Américains qui voulaient qu’on se joigne à leur sécession de l’Angleterre : une Confédération canadienne qui nous ignore comme nation fondatrice. Face à la guerre et à la crise de la conscription en 1942 : le pouvoir fédéral de dépenser dans les provinces à volonté. Après le premier référendum : une Constitution bétonnée et une Charte des droits fondées sur un multiculturalisme qui nous réduit à être une province comme les autres, et une minorité culturelle parmi les autres. Après le deuxième référendum, la Commission Gomery qui nous a révélé les magouilles de Jean Chrétien pour nous submerger. Et maintenant que Trump veut faire du Canada le 51e État américain, et que l’Ouest veut se séparer du Canada, un Carney tombé du ciel, en qui les Québécois se sont peut-être un peu trop empressés de voir un sauveur, propose de nous enrégimenter dans une nouvelle économie canadienne intégrée, sans frontières provinciales – avec le roi Charles en prime.
Quelle place reste-t-il pour notre société et notre économie québécoises distinctes par leur dimension collective, solidaire… et française ?
Ajoutons à cela la pression du nombre et de la langue qu’exerce sur la nation française québécoise une immigration massive mal contrôlée par Ottawa, ainsi que la pression culturelle et sociale quotidienne qu’exercent les grands réseaux numériques mondialisés sur notre identité et notre souveraineté politique, et il y a de quoi être inquiet pour notre avenir comme nation distincte et unique en Amérique et dans le monde.
Mais notre amour pour le Québec doit être le plus fort, et nous inciter à prendre tous les moyens nécessaires pour garantir l’identité et la souveraineté politique de notre nation. Nous devons faire corps avec les 11 communautés autochtones qui nous ont accueillis et guidés sur ce grand territoire, ses forêts immenses, ses grandes rivières, et ses hivers sans bon sens ; avec tous ces migrants qui ont fait de Montréal et de Québec des villes cosmopolites, et qui gagnent maintenant chacune de nos régions éloignées ; avec aussi tous ces vaillants travailleurs étrangers qui viennent prêter main-forte à nos agriculteurs et à nos travailleurs en usine.
Il faut redécouvrir ensemble le goût du Québec, l’attachement à cette terre, et à nos villes et villages, à la beauté et au pouvoir de ses rivières, à la richesse de ses forêts, et aux trésors de sa roche-mère ; découvrir le goût de nous gouverner nous-mêmes dans la solidarité, l’égalité et la liberté, sans nous laisser endormir par ceux qui voudraient qu’on oublie ce que nous sommes.
Photo : Suzanne Lacroix, flickr.com